OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Conditions générales de mystification http://owni.fr/2012/04/04/conditions-generales-de-mystification/ http://owni.fr/2012/04/04/conditions-generales-de-mystification/#comments Wed, 04 Apr 2012 06:32:14 +0000 Lionel Maurel (Calimaq), Andréa Fradin et Marion Boucharlat http://owni.fr/?p=104662

Dans les séries américaines, on lit leurs droits avant toute chose aux personnes interpellées par la police. Sur le web, les internautes auraient également besoin qu’on leur “lise leurs droits”, car au fil de notre navigation, nous sommes sans cesse en train d’accepter des conditions contractuelles d’utilisation des services que nous utilisons, qui influent grandement sur notre condition juridique.

Les CGU (Conditions Générales d’Utilisation) ou ToS en anglais (Terms of Service), ce sont ces pages interminables, écrites en petits caractères et dans un jargon juridique difficilement accessible au commun des mortels, que nous acceptons généralement sans les lire en cochant une case. Elles ont pourtant une incidence importante sur nos droits en ligne, notamment sur la protection de nos données personnelles, ainsi que sur la propriété de nos contenus.

Pour nous aider à y voir clair dans cette jungle des CGU, OWNI publie cette semaine une infographie (voir aussi au bas de l’article) analysant les conditions d’utilisation de quatre géants du Web : Google, Facebook, Twitter et Apple. Une image vaut mieux qu’un long discours et c’est particulièrement vrai en matière de CGU, dont l’une des caractéristiques réside dans leur opacité pour les internautes.

CGU : à prendre ou à laisser ?

Les CGU tirent leur force du fait qu’elles ne sont pas négociables par les utilisateurs des services en ligne et qu’une fois acceptées, l’utilisateur se trouve lié à ces règles par sa propre volonté. Mais ce nouveau visage de la servitude volontaire n’est peut-être pas une fatalité. Les internautes semblent en effet de plus en plus prendre conscience de l’importance de ces conditions contractuelles, ainsi que du fait qu’ils peuvent agir collectivement pour obtenir des modifications.

En ce moment même a lieu sur Pinterest, réseau social montant aux États-Unis, une “manifestation virtuelle” qui pourrait déboucher sur des modifications importantes des conditions d’utilisation du site. Plus de 45 000 personnes ont épinglé en signe de protestation sur leur profil une image, avec ces mots : “Dear Pinterest, Please Change your Terms or I’m Leaving“.

Dans la tourmente depuis plusieurs semaines, après avoir subi des accusations à répétition de violation du droit d’auteur, Pinterest a été obligé de prendre très au sérieux le mécontentement populaire de ses usagers. La plateforme a modifié ses CGU de manière à adopter une attitude moins appropriative, notamment en renonçant à la possibilité de revendre les contenus de ses usagers à des tiers.

De telles actions collectives ont déjà été couronnées de succès dans le passé. En 2009, lorsque Facebook avait modifié ses CGU afin de s’accorder tous les droits, pour toujours sur les contenus personnels de ses usagers, une bronca s’était déclenchée qui avait fait reculer le géant des médias sociaux, alors en plein essor. L’épisode s’était terminé par la publication d’une charte des droits et responsabilités, aboutissant à un rapport plus équilibré entre la plateforme et ses utilisateurs, même si Facebook a depuis défrayé la chronique à plusieurs reprises par ses changements de CGU.

Le même phénomène s’était produit lors de la Nymwar en 2011. Après avoir bataillé férocement pour imposer aux utilisateurs de Google + de révéler leur véritable identité, la firme de Mountain View a fini par céder devant la pression pour accepter les pseudonymes.

Nul n’est censé ignorer la loi (même les CGU…)

Néanmoins, ces mobilisations des internautes ne sont pas toujours suffisantes pour obtenir de meilleurs équilibres dans les CGU des services et l’infographie d’OWNI montre bien la condition plus que précaire de nos droits, face à des géants comme Twitter, Facebook, Apple ou Google.

La question se pose alors de savoir dans quelle mesure les États, par le biais de leurs lois, sont capables de protéger les citoyens contre les dérives les plus inquiétantes des médias sociaux, notamment en termes d’exploitation des données personnelles.  Même si les dérives des médias sociaux se succèdent à un rythme inquiétant, l’actualité récente a montré que les États ne sont pas complètement démunis pour faire pression sur les grandes firmes du web.

Outre-Atlantique, la puissante Federal Trade Commission est ainsi parvenue en novembre 2011 à imposer, par le biais d’un accord amiable avec Facebook, une mise sous surveillance pendant 20 ans du réseau social, qui devra se plier régulièrement à des audits indépendants concernant l’utilisation des données personnelles. Plus important encore du point de vue des CGU, Facebook s’est engagé à obtenir le consentement explicite des utilisateurs lors du changement de ses conditions d’utilisation, et notamment de ses réglages de confidentialité.

En effet, comme le montre bien l’infographie, les CGU ne sont pas seulement complexes  ; elles sont aussi mouvantes et connaissent des changements réguliers, que les utilisateurs sont réputés accepter implicitement, après s’être inscrits une fois sur un service. Ce type de clauses peuvent s’avérer particulièrement dangereuses et “déloyales”. C’est par ce biais que Twitter par exemple a pu se présenter pendant trois ans comme une plateforme respectueuse des droits de ses utilisateurs, avant de changer brutalement ses CGU en 2009 pour obtenir rétroactivement des droits très étendus sur les contenus de ses utilisateurs. Cette clause est restée longtemps “dormante”,  jusqu’à ce que Twitter revende le mois dernier deux ans d’archives à des sociétés anglaises de data mining. L’évolution des CGU ressemble parfois à une partie d’échecs, où les attaques se construisent plusieurs coups en avance…

Du côté des données personnelles, une nouvelle directive est actuellement en préparation pour remplacer l’actuel texte en vigueur qui remonte à 1995. Si elle est à l’origine d’un régime reconnu comme l’un des plus protecteurs au monde, cette directive commence à atteindre ses limites, confrontée à de nouveaux défis comme le cloud computing ou à des pratiques de croisement de données sans précédent, comme celle que Google vient de s’octroyer la possibilité de mettre en oeuvre en unifiant les conditions d’utilisation de ses différents services.

D’autres CGU sont-elles possibles ?

Pour agir en amont afin de garantir la protection des données personnelles, on évoque de plus en plus comme solution le Privacy by Design, c’est-à-dire la prise en compte de la vie privée dès la conception, qui pourrait être consacré par la future directive européenne.

Mais ce “Privacy by Design” peut aussi résulter des CGU d’un service, qui agissent alors comme une sorte de “code génétique” modelant son fonctionnement dans le sens du respect des droits des utilisateurs. C’est le cas par exemple du réseau social alternatif Diaspora, dont le Bill of Rights est axé sur le respect d’un certain nombre de principes d’honnêteté, de transparence, de prédictibilité, de maîtrise, plaçant le respect des droits individuels au cœur de la plateforme.

Cet exemple montre comme le souligne l’infographie que d’autres CGU sont possibles, que ce soit en termes d’intelligibilité ou d’équilibre des droits.

Certaines plateformes par exemple utilisent les licences libres pour garantir que les contenus produits par les utilisateurs, s’ils peuvent être réutilisés, ne pourront pas faire l’objet d’une appropriation exclusive. C’est le cas par exemple du réseau de microblogging alternatif identi.ca, placé sous licence Creative Commons BY ou bien entendu, de l’encyclopédie collaborative Wikipédia, où la licence CC-BY-SA tient lieu de CGU pour la partie propriété des contenus. Personne n’étant en définitive propriétaire du contenu global de Wikipédia, cette forme de non-propriété protège les contributeurs contre les risques de revente qui ont pu survenir pour d’autres plateformes contributives, même si tout risque de dérive n’est pas absolument écarté comme l’a montré récemment le partenariat entre Orange et Wikipédia.

Le réseau Tumblr s’est récemment distingué de son côté par l’effort qu’il a consacré pour traduire en termes intelligibles ses CGU, en s’écartant du jargon juridique habituel et allant même jusqu’à recourir à l’humour. Les clauses relatives à la propriété des contenus par exemple sont ainsi clairement compréhensibles et remarquablement équilibrées :

When you upload your creations to Tumblr, you grant us a license to make that content available in the ways you’d expect from using our services (for example, via your blog, RSS, the Tumblr Dashboard, etc.). We never want to do anything with your content that surprises you.

Something else worth noting: Countless Tumblr blogs have gone on to spawn books, films, albums, brands, and more. We’re thrilled to offer our support as a platform for our creators, and we’d never claim to be entitled to royalties or reimbursement for the success of what you’ve created. It’s your work, and we’re proud to be a part (however small) of what you accomplish.

(Quand vous mettez vos créations sur Tumblr, vous nous accordez une licence permettant de rendre votre contenu disponible conformément à ce que vous pourriez attendre en utilisant nos services (par exemple, via votre blog, le flux RSS ou sur le Tumblr Dashboard, etc.). Nous ne voulons jamais faire avec votre contenu quoique ce soit qui pourrait vous surprendre.
Autre élément notable : de nombreux Tumblr ont donné suite à des livres, des films, des albums, des marques, et plus encore. Nous sommes ravis d’apporter notre soutien en tant que plate-forme pour nos créateurs et nous ne réclameront jamais de droit à des royalties ou à un remboursement pour le succès remporté par ce que vous avez créé. C’est votre travail, et nous sommes fiers d’avoir contribué (aussi modestement soit-il) à ce que vous avez accompli.)

On est ici très loin, comme le montre l’infographie, des méandres tortueuses des 47 pages de CGU des services d’Apple ou du double langage employé dans les CGU de Twitter. Ce type de démarche indique même peut-être une voie intéressante pour régénérer l’approche des CGU. De la même manière que les licences Creative Commons ont modifié l’approche du droit d’auteur en traduisant les contrats en termes compréhensibles par les humains (“human readable”), on pourrait imaginer un effort similaire pour transcrire les CGU en des principes plus courts et plus clairs.

Outre un travail sur le langage, cette démarche pourrait également comporter une dimension graphique, recourant comme les Creative Commons  à des logos pour exprimer de manière lisible en un coup d’oeil les conditions d’utilisation.

La fondation Mozilla avait ainsi proposé des “Privacy Icones” qui auraient permis de faire apparaître clairement aux yeux des internautes la politique de confidentialité des sites Internet. Cette approche graphique, qui reviendrait à créer des “Creative Commons de la présence numérique“, pourrait en effet s’avérer beaucoup plus efficace que les chartes ou déclaration des droits que l’on trouve sur certains sites.

La question de l’hybride juste, enjeu des CGU

Au final, l’infographie d’OWNI montre que nous sommes encore très loin de l’émergence d’hybrides justes, selon la formule employée par le juriste Lawrence Lessig. Par le terme “hybride”, Lessig désigne le fait que les médias sociaux se sont développés à cheval entre une économie marchande classique et une économie de la contribution, qui fait que leurs contenus leur sont généralement fournis volontairement et gratuitement par leurs utilisateurs (User Generated Content). L’enjeu des CGU est de parvenir à créer un rapport juste et équilibré entre les droits que la plateforme doit se faire céder pour fonctionner et développer un modèle économique, et les droits que les individus doivent garder pour préserver leurs intérêts fondamentaux.

La quête de “l’hybride juste” est sans doute l’un des défis majeurs pour l’évolution du web, auquel il n’existe actuellement aucune solution entièrement satisfaisante. Toutes les pistes sont bonnes à explorer pour arriver à ce résultat et pourquoi ne pas aller faire un tour pour finir sur des sites sites qui ont mis en place des sorte d’anti-CGU, burlesques chez Oyoyo ou poétiques chez Babelio ?

Et sur 4chan, il n’y a pas de CGU, mais des Rules (“règles”), comme au Fight Club !


Texte : Lionel Maurel (Calimaq)
Infographie : Andréa Fradin et Marion Boucharlat
Design : couverture, illustrations et infographie réalisées par Marion Boucharlat pour Owni /-)

]]>
http://owni.fr/2012/04/04/conditions-generales-de-mystification/feed/ 79
Des données culturelles à diffuser http://owni.fr/2012/03/28/des-donnees-culturelles-a-diffuser-opendata-bnus/ http://owni.fr/2012/03/28/des-donnees-culturelles-a-diffuser-opendata-bnus/#comments Wed, 28 Mar 2012 13:01:37 +0000 Lionel Maurel (Calimaq) http://owni.fr/?p=103776

Les données culturelles ou celles qui concernent la recherche occupent une place particulière parmi les données publiques. Elles restent de fait encore en retrait au sein du mouvement d’Open Data qui se développe en France.

Données particulières

En effet, un statut juridique particulier a été fixé par la loi sur la réutilisation des informations publiques, pour les données produites par “des établissements et institutions d’enseignement ou de recherche” ou par des “établissements, organismes ou services culturels”. Ce régime particulier, dit “exception culturelle”, permet à ces établissements de fixer les conditions de la réutilisation de leurs données. Les autres administrations relèvent du régime général de cette loi, qui instaure un véritable droit à la réutilisation des informations publiques au profit des citoyens.

Jusqu’à présent, les institutions culturelles et de recherche se sont plutôt servies de cette exception pour restreindre la réutilisation de leurs données, ce qui a pu faire dire que la culture constituait le “parent pauvre de l’Open Data en France“.

Des tensions sont même apparues entre certains services culturels, comme des archives,  et des entreprises à qui la réutilisation des données a été refusée. Les institutions culturelles (bibliothèques, musées, archives) et les institutions de recherche sont pourtant détentrices de données de grande qualité, dont l’apport pourrait être décisif pour le mouvement de l’Open Data.

La France entr’ouverte

La France entr’ouverte

L'État a lancé son site data.gouv.fr. La France, enthousiaste, ouvre donc ses données publiques comme les États-Unis. ...

Le lancement du portail Etalab, de ce point de vue, n’a pas complètement permis de lever les obstacles à la diffusion de ces données. Le Ministère de la Culture et de la Communication, ainsi que celui de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche participent bien à data.gouv.fr, et mettent en ligne plusieurs jeux de données.

En effet, les ministères en eux-mêmes ne bénéficient pas de l’exception culturelle prévue dans la loi de 1978, celle-ci n’étant ouverte qu’aux profits des établissements, institutions et services relevant de leurs tutelles ou a fortiori de celles des collectivités territoriales. De ce fait, ces ministères ont dû, de la même manière que tous les autres, se plier à l’obligation, imposée par la circulaire émise le 26 mai 2011 par François Fillon, de verser leurs données dans data.gouv.fr.

La circulaire a posé dans ce cadre un principe de réutilisation gratuite des données publiques, les administrations ne pouvant imposer de redevances que si “des circonstances particulières le justifient” et par le biais de la procédure relativement lourde d’un décret du Premier Ministre.

Néanmoins l’exception culturelle, si elle ne joue pas au niveau des ministères, continue à protéger les établissements publics. En effet, la circulaire du 26 mai 2011 précise que :

L’article 11 de la loi prévoit un régime dérogatoire pour les établissements et les institutions d’enseignement et de recherche ainsi que pour les établissements, organismes ou services culturels qui fixent, le cas échéant, leurs conditions de réutilisation de leurs informations publiques. Ces établissements ainsi que les collectivités territoriales et les personnes de droit public ou de droit privé chargées d’une mission de service public peuvent, s’ils le souhaitent, mettre à disposition leurs informations publiques sur le portail ‘data.gouv.fr’. Dans ce cas, une convention fixe les conditions de réutilisation de ces informations.

La participation à Etalab reste donc facultative pour les organismes culturels ou de recherche et c’est bien ce que traduit la liste des contributeurs, puisque seule la Bibliothèque nationale de France y figure à ce jour, pour une partie de ses données. C’est pourtant au niveau des établissements eux-mêmes que les jeux de données les plus intéressants sont situés (catalogues, instruments de recherche, données bibliographiques, documents numérisées, etc).

Licence ouverte

Cependant, cette mise à l’écart des données culturelles et de recherche n’est pas une fatalité. Car comme j’avais déjà eu l’occasion de le dire, les établissements peuvent user des latitudes dont ils bénéficient au titre de l’exception culturelle pour poser des règles favorables à la réutilisation. Rien ne les oblige à aller dans le sens de la fermeture.

De ce point de vue, Etalab leur offre un instrument essentiel pour mettre en place des conditions ouvertes de diffusion des données : la Licence Ouverte/Open Licence, retenue pour le portail data.gouv.fr.

Cette licence Etalab présente l’intérêt d’être ancrée dans le droit des données publiques français, tout en étant compatible avec les principes de l’Open Data et les licences libres employées dans le cadre de ces initiatives. S’appuyant sur le droit à la réutilisation des données publiques reconnues par la loi de 1978, la licence Etalab permet la réutilisation gratuite, y compris à des fins commerciales, tout en maintenant les exigences minimales du texte et notamment la mention obligatoire de la source des données (paternité).

Depuis l’ouverture du portail Etalab, un seul établissement culturel avait utilisé cette licence Etalab de manière volontaire pour la diffusion de ses données. Il s’agit de la BnF pour les données bibliographiques enrichies qu’elle diffuse au format RDF par le biais du site data.bnf.fr.

Néanmoins la semaine dernière, une autre bibliothèque, la Bibliothèque Nationale et Universitaire de Strasbourg (BNUS) a annoncé qu’elle adoptait la licence Etalab pour se lancer dans une démarche globale de libération de ses données. Une interview de l’un des responsable de l’établissement, le conservateur Frédéric Blin, explique la démarche de l’établissement et les raisons l’ayant poussé à faire ce choix.

La première originalité de la BNUS consiste à avoir choisi d’utiliser la licence Etalab aussi bien pour diffuser les métadonnées produites par l’établissement que pour les documents numérisés eux-mêmes, qu’elle produit à partir des œuvres du domaine public qu’elle conserve.


“La décision exacte votée par notre Conseil d’administration est formulée de la manière suivante”
:

La décision exacte votée par notre Conseil d’administration est formulée de la manière suivante :

  • Les données bibliographiques (dont les métadonnées des documents numériques) produites par la BNU sont considérées comme des données publiques et à ce titre placées sous Licence Ouverte ou autre licence compatible (libre réutilisation, y compris à des fins commerciales, sous réserve de mentionner la source de l’information) ;
  • Les fichiers numériques issus de la numérisation par la BNU d’œuvres du domaine public conservées dans ses collections sont considérés comme des données publiques et à ce titre placés sous Licence Ouverte ou autre licence compatible.

Par ailleurs, Frédéric Blin explique le calcul économique qui a conduit son établissement à renoncer à tarifer les réutilisations à des fins commerciales de ses données :


Avant notre décision, nous appliquions une redevance d’usage, de l’ordre de 35€ par image [...] Cependant, les sommes récoltées par la BNU chaque année au titre de la redevance d’usage étaient minimes, de l’ordre de 3000€. Elles ne couvraient naturellement pas le temps de travail de la secrétaire chargée de gérer les factures et la correspondance avec les lecteurs, ni le temps des autres personnes – y compris de l’Administrateur – impliquées en cas de demande d’exonération ponctuelle ou systématique. En outre, nous espérons que l’abandon de la redevance d’usage entrainera une augmentation des demandes de numérisation de documents, service qui lui restera payant. Dans notre cas particulier, nous pensons qu’en autorisant la libre réutilisation, l’établissement sera au final bénéficiaire au strict plan financier.

D’autre part, nous estimons que la libération des données favorise la créativité artistique et intellectuelle, de même que commerciale : établissement public, il est dans l’intérêt de la BNU de favoriser le dynamisme économique et commercial du pays, créateur d’emplois et générateur de rentrées fiscales. La BNU devient ainsi indirectement une source d’activité économique : le retour sur l’investissement consenti par la Nation pour le financement de la BNU trouve ici une concrétisation potentiellement mesurable.

Cette logique, qui est complètement en phase avec la philosophie de l’Open Data, est hélas fort peu répandue dans le secteur culturel. J’avais eu l’occasion de montrer par exemple, à partir d’une analyse systématique des pratiques, qu’une part écrasante des bibliothèques françaises restreignent l’utilisation des œuvres du domaine public qu’elles numérisent, en recourant à des droits de propriété intellectuelle revendiqués dans des conditions contestables.

La situation n’est pas différente, sinon plus fermée encore, dans les services d’archives et de musées, et le discours au niveau central reste celui d’une valorisation économique des données, assortie d’une défense de l’exception culturelle.

Quelques établissements commencent à adopter une attitude plus ouverte, en employant notamment la Public Domain Mark, pour les documents du domaine public qu’ils diffusent.

L’exemple de la BNUS ouvre une nouvelle piste, plus générale, par laquelle la licence Etalab permet la libre diffusion à la fois des métadonnées et des documents numérisés.

L’enjeu de ces discussions n’est pas seulement juridique. Il est aussi celui de la participation des données produites par les institutions françaises, culturelles et de recherche, au mouvement général de l’Open Data et à la constitution du web sémantique.

Beaucoup de temps a sans doute été perdu en France autour de débats stériles à propos de cette exception culturelle, dont l’utilité reste encore à démontrer. Pendant ce temps, au niveau européen, une nouvelle directive sur la réutilisation des informations du secteur public est en préparation.

Dont l’un des enjeux est justement à savoir s’il faut maintenir un statut particulier pour les données de la culture et de la recherche.


Illustration par Marion Boucharlat pour Owni /-)

]]>
http://owni.fr/2012/03/28/des-donnees-culturelles-a-diffuser-opendata-bnus/feed/ 8
Increvable droit d’auteur http://owni.fr/2011/09/13/increvable-droit-dauteur/ http://owni.fr/2011/09/13/increvable-droit-dauteur/#comments Tue, 13 Sep 2011 11:06:41 +0000 Lionel Maurel (Calimaq) http://owni.fr/?p=79229 La semaine dernière a été une semaine de deuil pour le domaine public, à double titre.

Michael Hart, pionnier de l’édition électronique et père du projet Gutenberg, est mort après avoir consacré sa vie à favoriser la libre diffusion des textes du domaine public. Avec Wikisource et Internet Archive, le projet Gutenberg était l’un des rares espaces du web où l’on pouvait encore trouver du domaine public « à l’état pur », sans couches de droit plus ou moins illégitimement rajoutées.

Hervé Le Crosnier, sur son blog Mediapart, explique bien en quoi une initiative comme le projet Gutenberg est essentielle pour la vitalité du domaine public :

Le projet Gutenberg, avec ses 37000 livres en 60 langues, est aujourd’hui une des sources principales de livres numériques gratuits diffusés sous les formats actuels (epub, mobi,…) pour les liseuses, les tablettes, les ordiphones, et bien évidemment le web. Les textes rassemblés et relus sont mis à disposition librement pour tout usage. La gratuité n’est alors qu’un des aspects de l’accès aux livres du projet Gutenberg : ils peuvent aussi être transmis, ré-édités, reformatés pour de nouveaux outils, utilisés dans l’enseignement ou en activités diverses… Le « domaine public » prend alors tout son sens : il ne s’agit pas de simplement garantir « l’accès », mais plus largement la ré-utilisation. Ce qui est aussi la meilleure façon de protéger l’accès « gratuit » : parmi les ré-utilisations, même si certaines sont commerciales parce qu’elles apportent une valeur ajoutée supplémentaire, il y en aura toujours au moins une qui visera à la simple diffusion.

Le droit d’auteur s’étend dans les législations

Lorsqu’en 1998, le législateur américain avait voté le Sonny Bono Act (dit aussi Mickey Mouse Act, en référence aux pressions exercées par le lobby des industries culturelles pour faire passer ce texte), afin d’étendre la durée de protection par le copyright sur les oeuvres collectives d’entreprise, Michael Hart avait fait partie de l’action en justice portée jusque devant la Cour suprême des Etats-Unis pour s’opposer à cette agression contre le domaine public, hélas sans succès.

Triste ironie des coïncidences, la semaine même où il disparaît, le Conseil des Ministres de l’Union européenne a validé le projet d’extension des droits voisins des producteurs et des artistes-interprètes de 20 ans supplémentaires, et c’est une seconde raison de porter le deuil.

Cela fait des années que nous sommes habitués à subir des lois absurdes et liberticides en matière de droit d’auteur, mais on ne peut rien imaginer de plus grave qu’un allongement de la durée des droits, en termes d’atteinte aux libertés. L’Union européenne s’achemine vers un passage de 50 à 70 ans des droits voisins, avec effet rétroactif, ce qui signifie que, non content d’empêcher des oeuvres d’entrer dans le domaine public, cette réforme va  en faire sortir des enregistrements pour lesquels les droits s’étaient éteints.

Pour expliquer les choses par le biais d’une métaphore, c’est un peu comme si un législateur fou décidait qu’il fallait vider la mer pour désormais la vendre en bouteille…

Une fausse bonne idée

De multiples études et rapports avaient pourtant montré que cette extension ne profiterait quasiment pas aux artistes eux-mêmes, mais les arguments rationnels ne pèsent visiblement pas lourds face aux pressions du lobby des industries de la musique, qui trouvent là un moyen commode de continuer à profiter des « joyaux de la couronne », à savoir la musique des années 50 et 60 qui était sur le point de se libérer des droits voisins.

Un exemple, que je trouve particulièrement emblématique, d’enregistrement qui devrait être arraché du domaine public du point de vue des droits voisins : ““La vie en rose” de Piaf, interprétée pour la première fois en 1947.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Le plus écœurant sans doute dans cette histoire, c’est que la Commission européenne a soutenu pendant des années un projet Communia, de réflexion sur le domaine public numérique, qui a produit un Manifeste du Domaine Public s’opposant radicalement à  l’idée d’extension des droits :

La durée de protection par le droit d’auteur doit être réduite. La durée excessive du droit d’auteur, combinée à l’absence de formalités réduit fortement l’accessibilité de notre savoir et notre culture partagés. De plus, cette durée excessive accroît le nombre des œuvres orphelines, œuvres qui ne sont ni sous le contrôle de leurs auteurs ni dans le domaine public, et ne peuvent être utilisées. Donc, la durée de protection par le droit d’auteur des nouvelles œuvres doit être réduite à un niveau plus raisonnable.

Tout changement de l’étendue de la protection par le droit d’auteur (y compris toute définition de nouveaux objets protégeables ou toute expansion des droits exclusifs) doit prendre en compte ses effets sur le domaine public. Un changement de la durée de protection du droit d’auteur ne doit pas s’appliquer rétroactivement aux œuvres déjà protégées. Le droit d’auteur est une exception de durée limitée au statut de domaine public de notre culture et notre savoir partagés. Au 20ème siècle, l’étendue du droit d’auteur a été significativement étendue, pour satisfaire les intérêts d’un petit groupe de détenteurs de droits et au détriment du public dans son ensemble. De ce fait, la plus grande part de notre culture et notre savoir partagé s’est retrouvée soumise à des restrictions liées au droit d’auteur ou techniques. Nous devons faire en sorte que cette situation n’empire pas (au minimum) et s’améliore.

Pour mettre en oeuvre ce Manifeste du domaine public, il aurait fallu une réforme en profondeur du droit d’auteur européen, mais rien n’a été entrepris en ce sens depuis sa parution et l’extension des droits voisins en trahit même complètement l’esprit.

Comment lutter?

Face à une telle instrumentalisation du droit au profit d’intérêts privés, que reste-t-il à faire ?

Bien sûr, on peut songer à essayer d’attaquer devant la justice communautaire les textes qui procéderont à cet allongement des droits voisins, comme l’avaient fait les tenants de la culture libre aux Etats-Unis (affaire Eldred c. Ashcroft) et comme ils continuent à le faire quand le domaine public est menacé. Mais ce combat risque d’être plus symbolique qu’autre chose, car à présent aucune de ces actions n’a débouché sur une condamnation de l’extension des droits, et je ne sais pas si les chances de victoire seraient plus fortes en Europe qu’aux Etats-Unis.

Bien sûr, il reste possible d’agir au quotidien en faveur du domaine public, en contribuant à certains projets. J’ai déjà cité Wikisource, le projet Gutenberg ou Internet Archive, mais il existe également de belles initiatives dans le domaine de la musique, comme l’International Music Score Library Project ou le projet Musopen, qui vise justement à libérer la musique classique de l’emprise des droits voisins

Une autre manière d’agir, à un niveau encore plus « personnel », consiste à verser ses propres créations par anticipation dans le domaine public, en utilisant des outils appropriés, comme la Creative Commons Zero ou des licences très ouvertes. En utilisant la licence CC-BY par exemple pour ce blog, je place mes billets sous un régime plus ouvert encore que le domaine public dans sa conception française, dans la mesure où je permets à l’avance la modification (alors que normalement en France, le droit à l’intégrité persiste lorsque l’oeuvre entre dans le domaine public).

La légalité ne suffit peut-être plus

Mais malgré la contribution que ces moyens d’action peuvent apporter, je ne les pense plus suffisants pour renverser une situation qui ne cesse de se dégrader et des moyens d’action plus radicaux doivent peut-être à présent être envisagés.

Un exemple nous a été donné cet été avec les actions menées contre la base de données d’articles scientifiques JSTOR aux Etats-Unis. Pour s’opposer à l’accès payant aux articles du domaine public de cette base, l’activiste Aaron Schwartz a téléchargé en juillet dernier 4,8 millions d’articles à partir du réseau du MIT, ce qui lui valut d’être arrêté par le gouvernement fédéral et menacé de prison ferme. Un peu plus tard, un utilisateur du nom de Greg Maxwell a surenchéri, en mettant en partage 18 592 articles du domaine public issus de JSTOR sur The Pirate Bay pour les libérer.

Or la semaine dernière, on apprenait que JSTOR décidait de placer en libre accès 500 000 articles du domaine public, tirés de plus de 200 journaux historiques. Quand bien même JSTOR s’en défend, cette décision a été prise suite aux actions de Schwartz et Maxwell, qui ont placé le producteur de la base dans une situation intenable :

Rendre librement accessible les contenus de la base Early Journal est une chose que nous avions prévue de faire depuis un moment. Il ne s’agit pas d’une réaction à la situation créée par Swartz et Maxwell, mais ces récents évènements ont pu avoir une incidence sur notre calendrier. Nous faisons attention à ne pas accélérer ou retarder nos projets, simplement parce que des gens interprètent mal nos motivations. Nous tenons aussi compte du fait que de nombreuses personnes sont préoccupés par ces questions. Finalement, nous avons décidé d’accélérer notre projet de rendre accessible le contenu du Early Journal, parce que nous pensons que c’est dans l’intérêt des personnes auxquelles nous essayons de rendre service, ainsi qu’aux bibliothèques et à nos partenaires.

Il existe d’autres exemples d’actions similaires menées avec succès pour libérer le domaine public. J’avais ainsi relevé l’été dernier que des utilisateurs de Google Books s’étaient habilement organisés pour procéder à des téléchargements massifs d’eBooks du domaine public, pour les placer en sécurité sur Internet Archive, sans que Google ne puisse vraiment agir contre eux. L’été d’avant, c’était un utilisateur de Wikipedia qui avait téléchargé un grand nombre de tableaux numérisés à partir du site de la National Gallery de Londres pour les libérer sur Wikimedia Commons. Le musée anglais qui s’estimait titulaire d’un copyright sur les images avait menacé de poursuites, mais à ce jour, les tableaux sont toujours sur Commons, accompagnés d’un bandeau “Domaine Public”.

Ce genre d’opérations de libération peut donc s’avérer efficace pour lutter contre le copyfraud (le fait de faire renaître illégitimement des droits sur le domaine public), mais que faire face à une situation telle que l’allongement des droits voisins, qui va empêcher les oeuvres d’entrer dans le domaine public ?

Devant de tels actes d’agression contre le domaine public et les libertés, c’est hélas encore le piratage, ou plutôt la mise en partage des fichiers, qui s’avère le moyen de résistance le plus efficace.

Entendons-nous bien : je suis juriste – jusqu’à l’os – ce qui implique que je crois profondément que le droit reste le moyen le plus juste d’organiser les rapports dans la société. Mais quand la loi bascule d’une manière aussi scandaleuse dans la défense d’intérêts privés, je pense que c’est un devoir de lutter, y compris par des moyens en marge du droit.

Hacker le domaine public

Si le domaine public n’est plus protégé par le droit, mais si celui-ci au contraire le menace et le détruit morceau par morceau, alors pour qu’il subsiste, il faudra le hacker et continuer à le faire subsister clandestinement au sein des réseaux de partage, en attendant la fin de l’interminable hiver juridique de la propriété intellectuelle. Visiblement, je ne suis pas le seul à franchir ce cap en ce moment et plus nombreux encore doivent être ceux qui le pensent sans l’écrire…

C’est avec tristesse que j’écris ces lignes, car j’ai longtemps cru en une évolution du droit d’auteur, mais des réformes comme l’allongement des droits voisins en Europe portent un coup mortel à ces espérances, car les dommage occasionnés seront quasiment irrémédiables à l’échelle d’une vie humaine.

Comme si cela ne suffisait pas, la semaine dernière, on a pu lire des déclarations hallucinantes sur le domaine public, qui montrent que le sens de cette notion est littéralement en train de se déliter et de se perdre.

Jean-Michel Jarre nous a en effet gratifié de ses réflexions sur la loi Hadopi, au détour desquelles on trouvait ce passage, qui m’a fait froid dans le dos :

Au XVIIIème siècle, on a décidé de manière assez subjective de se dire que le droit d’auteur, le copyright, aura une durée de vie de 50 ans. Pourquoi ? Parce qu’à cette époque-là, l’espérance de vie d’un être humain était de 50 ans. Aujourd’hui, on est deux siècles plus tard et il est temps de se dire ‘pourquoi on appliquerait pas ce qui existe dans l’industrie, c’est-à-dire le brevet ?

La philosophie du brevet c’est que c’est absolument infini et qu’on le renouvelle tous les 20 ans. Et moi, je suis absolument pour le fait d’élargir et d’allonger beaucoup la durée de vie du copyright ce qui permettrait, et c’est pas pour des problèmes de succession et des ayants droit de la famille de l’auteur, d’introduire dans la tête de chacun dans notre société aujourd’hui, le fait que le geste de création est quelque-chose qui a une valeur inestimable.

Aujourd’hui, personne d’entre nous ne peut se payer Mona Lisa. En revanche, la 9ème de Beethoven ne vaut rien. Est-ce que ça veut dire que Beethoven est un artiste mineur par rapport à Léonard de Vinci ? C’est toute la question et c’est sur tous ces problèmes qu’il va falloir que des lois du système de type Hadopi se penchent.

Passons sur les énormités concernant la manière dont fonctionne le système des brevets, mais au-delà, ce qui est sous-entendu ici, c’est que le droit d’auteur devrait être perpétuel et que le domaine public dévalue les oeuvres et la création, en permettant la libre réutilisation !

Ce n’est pas la première fois que s’expriment de telles attaques et l’idée revient même assez souvent qu’il serait temps que le domaine public « serve à quelque chose ». Pourquoi ne pas instaurer par exemple un « domaine public payant » en levant une taxe sur les réutilisations destinées à financer la création ? Cette proposition est revenue récemment dans un des Labs d’Hadopi sur le livre numérique et elle avait été agitée l’année dernière, à propos des films, cette fois dans le rapport Zelnik. Tôt ou tard, il faut craindre qu’un lobby n’arrive à trouver l’oreille du législateur pour inscrire ce projet funeste dans la loi…

Comment ne pas voir pourtant que la valeur du domaine public, c’est justement de constituer les oeuvres en biens communs, afin qu’elles puissent servir de terreau pour de nouvelles créations et innovations ?

Pour revenir au début de ce billet et boucler la boucle, sans la liberté de créer que lui offrait le domaine public, Michael Hart n’aurait certainement jamais inventé le premier eBook en 1971, qui constitue aujourd’hui une formidable innovation technologique offrant de multiples débouchés économiques.

Michael Hart, qui disait à propos de son Projet Gutenberg (merci @RemiMathis pour la traduction) :

Ce à quoi on ne pense pas assez quand on parle d’eBooks, c’est que, hormis l’air, c’est le premier bien que chacun peut obtenir comme il le veut. Pensez à cela et vous vous rendrez compte que nous faisons ce qu’il faut faire.

Il appartient désormais à chacun de faire ce qu’il faut faire

__

Billet initialement publié sous le titre “Hacker sur domaine public” sur :: S.I.Lex ::

Illustrations: FlickR CC PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales Scorpions and Centaurs

]]>
http://owni.fr/2011/09/13/increvable-droit-dauteur/feed/ 19
Amazon ouvre son locker musical http://owni.fr/2011/04/01/amazon-ouvre-son-locker-musical/ http://owni.fr/2011/04/01/amazon-ouvre-son-locker-musical/#comments Fri, 01 Apr 2011 07:00:09 +0000 David Héry - AF83média http://owni.fr/?p=31412 David Héry est rédacteur en chef du site AF83média.

Apple et Google sont sur les rangs pour lancer leur service de musique dématérialisée mais Amazon les devance en proposant le service Amazon Cloud Player, permettant aux utilisateurs de stocker leur bibliothèque musicale en ligne et d’y accéder via n’importe quel ordinateur ou mobile Android.

Avant toute chose, l’Amazon Cloud Player n’est disponible pour l’instant que sur le marché américain. Néanmoins, il devrait arriver chez nous très prochainement. L’Amazon Cloud Player se compose d’un Cloud Drive et d’un Cloud Player, le premier servant à stocker les fichiers et le second à les lire. Amazon met à disposition gratuitement 5 Go d’espace pour tous les internautes (soit 1000 chansons, 2000 photos ou 20 minutes de vidéo) et 20 Go à condition d’acheter un nouvel album sur Amazon. Ensuite, il est possible d’agrandir son espace de stockage à 50 Go (50 $ par an), 100 Go (100 $ par an), 200 Go (200 $ par an), 500 Go (500 $ par an) ou 1000 Go (1000 $ par an). Ce service est disponible sur les mobiles Android mais pas sur les iPhone. Amazon compte ainsi proposer une alternative à l’hégémonie d’iTunes.

“Nos clients nous ont dit qu’ils ne voulaient pas télécharger de musique sur leurs ordinateurs et portables de travail parce qu’ils trouvaient cela difficile de déplacer la musique d’un appareil à un autre”

explique Bill Carr, vice-président du département musique et films chez Amazon.

“Maintenant, qu’ils soient au boulot, à la maison ou sur leurs trajets, les clients peuvent acheter de la musique via Amazon MP3 et la stocker dans le cloud et la jouer n’importe où”.

La consommation de musique dématérialisée représente également un enjeu majeur pour Google et Apple. Google devait lancer à Noël dernier un service équivalent à celui d’Amazon. D’après les informations qui ont filtré,

ce service permettrait d’accéder à un espace de stockage virtuel et à une boutique de téléchargement pour 25 $ par an. Il permettrait également aux utilisateurs de partager des playlists. Pour le moment, Google est en pourparlers avec les maisons de disques pour s’entendre sur les conditions de rémunération du service.

De son côté, Apple travaillerait également sur un service de musique dématérialisée adossé à l’iTunes Store. Fin 2009, la société avait racheté lala.com, un site de streaming concurrent d’iTunes. Fermé depuis mai 2010, le site n’a pas réouvert depuis mais Apple utiliserait ses ingénieurs pour développer un service similaire à celui proposé par Amazon. Ce service serait inclus dans une nouvelle version de MobileMe qui permettrait à l’internaute d’accéder à ses fichiers musicaux via un service de musique en ligne, le tout pour 20 $ par an. Apple aurait déjà conclu un accord avec la major Warner.

A côté de ces poids lourds d’internet, de plus petites structures travaillent sur le concept de musique dématérialisée. Ainsi, lors du MidemNet Lab qui se tenait au cours du Midem en janvier dernier, l’application anglaise Psonar faisait partie du concours désignant LA start-up musique digitale B2C de l’année. Psonar permet à ses utilisateurs de sauvegarder leurs musiques dans un cloud et d’y accéder à tout moment et depuis tout type d’appareil. La start-up a développé également une nouvelle façon d’écouter de la musique légalement, le Pay-Per-Play. L’utilisateur peut écouter une chanson une fois. Cette écoute lui coûte une mini-facturation reportée sur son abonnement téléphonique.

Enfin, Spotify, pionnier sur le marché européen, permet depuis un an la fusion d’une bibliothèque musicale locale avec les morceaux du service. Mais ce service n’est pas disponible aux Etats-Unis. Autant dire qu’Amazon vient de frapper un grand coup sur le marché américain et que ses concurrents vont devoir réagir au plus vite. A suivre…

- EDIT -
Sony Music Entertainment a été la première major à réagir à l’annonce d’Amazon, par la voie d’un des ses porte-parole, qui a confié au Wall Street Journal : “Nous sommes déçus que le service de “locker” proposé par Amazon ne soit pas en accord avec les licences Sony Music”.

Ce à quoi Craig Pape, le directeur des services musicaux chez Amazon a répondu qu’il n’était pas d’accord : “Nous n’avons pas besoin de licence pour stocker de la musique. Notre service a les mêmes fonctionnalités qu’un disque dur externe”. (source : The New York Times).

Article initialement publié sur AF83média

Crédits photos : CC FlickR flakeparadigm ; cuttlefish

]]>
http://owni.fr/2011/04/01/amazon-ouvre-son-locker-musical/feed/ 1
Ben Ali: les compromissions d’Orange en Tunisie http://owni.fr/2011/03/03/ben-ali-les-compromission-dorange-en-tunisie/ http://owni.fr/2011/03/03/ben-ali-les-compromission-dorange-en-tunisie/#comments Thu, 03 Mar 2011 17:30:07 +0000 Olivier Tesquet http://owni.fr/?p=49669 Le 3 mars, OWNI publiait des documents exclusifs sur les compromissions du Groupe Orange avec le régime de Zine el-Abidine Ben Ali. Retrouvez comment Orange a pu racheter la troisième licence de téléphonie fixe et mobile en Tunisie.

Selon des documents inédits obtenus par OWNI.fr, le groupe Orange s’est compromis dans un schéma de corruption du régime de Zine el-Abidine Ben Ali lors de l’attribution de la troisième licence de téléphonie fixe et mobile en Tunisie.

Officiellement, Stéphane Richard a toujours présenté l’implantation de l’entreprise en Tunisie dans les mêmes termes, ceux évoqués dans Challenges le 27 janvier 2011, en pleine révolution:

En Tunisie, Orange a investi 260 millions d’euros: la moitié pour le réseau et l’autre pour acheter la licence. Ces 130 millions ont bien été versés à l’Etat et pas à l’entourage de l’ex-président.

Des propos démentis par nos documents. Contrairement a ce que martèle son P-DG, l’entreprise française (dont l’Etat est actionnaire à hauteur de 26,7%) n’a pas versé 130 millions d’euros dans les caisses de l’Etat tunisien pour obtenir le précieux sésame. Comme le montrent les comptes rendus de conseils d’administration en notre possession, Orange a investi 95 millions d’euros en juillet 2009 dans Divona pour acquérir 49% de son capital. Divona est une petite société privée, dont la valeur repose sur l’identité de ses propriétaires, Marouane Mabrouk – aujourd’hui directeur d’Orange Tunisie – et sa femme, Cyrine Ben Ali, fille du dictateur déchu. A eux deux, ils constituent des intermédiaires indispensables pour pénétrer le secteur et décrocher la fameuse licence. Le décret 2009-2270 paru au Journal Officiel tunisien le 31 juillet 2009 le prouve, c’est le président Ben Ali en personne qui appose son paraphe pour attribuer le marché à l’entreprise co-gérée par sa fille et son gendre.

Divona, le véhicule

D’emblée, le montant de la licence s’avère étonnamment bas, alors même que l’investissement global devait porter sur plus de 500 millions d’euros, ce qu’Orange reconnait lui-même. A titre de comparaison, l’opérateur Tunisiana avait dû débourser 280 millions d’euros quelques mois plus tôt pour une licence 2G. Mais un autre détail interpelle. La chronologie des événements est éloquente. Le 26 juin, le consortium Orange/Divona rafle officiellement la mise. Pourtant, lorsque le décret est signé le 13 juillet à Tunis, il est attribué au seul Divona Télécom. Et pour cause. Les documents l’attestent, ce n’est que le 24 juillet que l’entreprise du clan Mabrouk multiplie par 26 ses actifs lors d’une assemblée générale extraordinaire, une semaine jour pour jour avant la parution du décret au Journal Officiel. D’une petite structure qui pèse 2,6 millions d’euros, elle devient un véhicule rutilant évalué à 128 millions (243.875.471 dinars). Le prix de la décision. Pour grandir, Divona utilise un modus operandi habile: elle émet des actions dont la prime unitaire s’élève à 1.823 dinars, soit près de 1.000 euros au bénéfice de ses actionnaires: Orange Participations et Investec.

Une fois le montage financier savamment élaboré, Orange décide d’injecter ses 95 millions d’euros, mentionnés dans son rapport d’activité 2009. Pour cette prise de participation qui offre 49% d’Orange Tunisie (alors encore Divona) à l’opérateur français, ce dernier se résout à payer une “survaleur” de 25 millions d’euros. En langage financier, c’est un “goodwill”, car l’acheteur sait qu’il paye plus que le prix estimé, soit parce qu’il profite des droits de propriété intellectuelle de la structure dont il fait l’acquisition, soit parce qu’il pense tirer un bénéfice d’exploitation qui justifie ce sacrifice.

Et Marouane Mabrouk dans tout ça? Si on retranche les 95 millions d’Orange des 137 de capitaux propres de la structure “Orange Tunisie” (dénommée officiellement en octobre 2009), il a légitimement du débourser environ 40 millions d’euros. Mais l’investissement est bénéfique: le voilà catapulté actionnaire majoritaire d’une société dont il détient environ la moitié des parts, près de 70 millions d’euros. Une source proche du dossier résume ainsi la transaction:

Orange a fait deux cadeaux à Mabrouk: environ 15% de capital, et le contrôle de la structure.

Le clan Mabrouk prépare la victoire

Tout remonte à l’automne 2008. A l’époque, Marouane Mabrouk est l’un des hommes d’affaires les plus en vue du pays, membre d’une famille très proche du pouvoir. Marié à Cyrine Ben Ali, la fille du président (elle est issue de son premier mariage), il possède des concessions automobiles et plusieurs enseignes de la grande distribution. Avec ses frères, il s’est solidement implanté dans le secteur bancaire et il voit dans les télécoms une belle opportunité. Au mois de novembre, anticipant un important appel d’offres, le couple décide de racheter à Monaco Télécom sa participation dans Divona, pour en faire le premier opérateur 100% tunisien. Cyrine devient présidente du conseil d’administration. La première pierre est posée.

Le 3 décembre 2008, dans un timing quasi-parfait, le gouvernement tunisien lance un appel d’offres international pour l’attribution d’une troisième licence 2G/3G. Déjà, certains s’inquiètent. “Dix jours plus tard, nous savions qui emporterait la mise”, explique un connaisseur du dossier. Qui? “Divona, et Orange”. Alors que les compétiteurs renoncent les uns après les autres – “le cahier des charges favorisait clairement certains opérateurs”, explique la même source – seuls deux consortiums restent en lice: Orange/Divona, et Turkcell.

Le leader du marché turc est épaulé par Princess, la holding de Mohamed Sakhr El Materi, un autre poids lourd de l’économie locale. Récemment éjecté de la partie à la faveur de la révolution, il est marié à Nesrine Ben Ali, fille de Leïla Trabelsi, la “régente de Carthage”, deuxième femme de Ben Ali. Aux yeux d’une source proche du dossier qui préfère garder l’anonymat, le modus operandi d’Orange et de son partenaire tunisien est simple: “ils s’alignent sur un prix qui se situe autour de 130 millions d’euros”.

Dans les semaines qui suivent, le clan Mabrouk prépare la victoire. Le 2 février, un décret – signé par Ben Ali en personne – fixe les conditions d’attribution de la licence. Le 5 mars, Investec, une entreprise entre les mains de Marouane Mabrouk et de sa femme, actionnaire à 100% de Divona, modifie ses statuts. Son gérant, Fethi Bhouri, démissionne, la SARL devient société anonyme, et le couple prend seul les commandes. Dans le procès-verbal du conseil d’administration du 3 avril, Investec explique les prévisions pour l’année:

Un business plan a été établi conjointement avec le cabinet Rothschild


Cliquer sur la visualisation pour l’agrandir

Cet accord, ventilé entre plusieurs sociétés (voir la visualisation ci-dessus), a été élaboré grâce au savoir-faire d’Hakim El Karoui, banquier d’affaires chez Rothschild et responsable des fusions/acquisitions en Afrique et sur le pourtour méditerranéen. Avant même la valorisation de Divona – et la subtilité réside ici – le schéma final est déjà connu: Marouane Mabrouk possède 51% des parts à travers Investec, la société actionnaire à 100% de Divona, et Orange détient 49%, récupérés par le biais d’un investissement d’Orange Participations, fililale de France Télécom.

En conséquence, un nouveau conseil d’administration est nommé:

- Trois dirigeants d’Orange
- La société Investec (représentée par Marouane Mabrouk)
- Hakim El Karoui

Déjà contesté après ses courriers adressés à Ben Ali à l’aube de sa fuite, le banquier d’affaires se retrouve une fois de plus dans l’oeil du cyclone. Joint par téléphone, il reconnaît être devenu administrateur de Divona, “mais a posteriori”. Pourtant, sa nomination est votée le 20 juillet, entre la signature du décret et sa publication au Journal Officiel. “Je n’ai pas d’actions, et Rothschild est intervenu à seul titre de conseil”, explique-t-il, en ajoutant qu’une fois sa mission accomplie, il était tout à faire libre d’entrer au conseil d’administration. “En conséquence, je fais le lien entre les deux actionnaires. Je n’ai rien à cacher”. Drôle de définition des conflits d’intérêts.

Vers la nationalisation?

Dès lors, tout devient limpide. Orange n’a pas payé “130 millions à l’Etat tunisien pour l’obtention d’une licence”, mais s’apprête à payer une somme considérable – les 95 millions – pour devenir actionnaire à 49% de la société qui a empoché la mise. On comprend alors mieux les inquiétudes de Marouane Mabrouk par rapport au risque de nationalisation qui guette son entreprise. Placé vendredi 15 février par le conseil des ministres sur la liste noire des proches de Ben Ali dont les biens doivent être confisqués, l’homme d’affaires pourrait tout perdre. De tous les côtés, les syndicats réclament la nationalisation de sa part dans l’entreprise. Dans ce deal global de 260 millions d’euros, il devait récupérer environ 26 millions d’euros. 10%, l’équivalent d’une commission dans les secteurs de l’armement et de l’énergie. En accordant cette faveur à Marouane Mabrouk, France Télécom est susceptible de violer la convention de Mérida sur la corruption, en vigueur depuis 2005.

L’actionnaire majoritaire – l’Etat français – reste pour sa part insaisissable. Contacté par OWNI, le Fonds stratégique d’investissement (FSI, 13,5% d’Orange), qui dispose d’un siège au conseil d’administration, renvoie vers l’Agence des participations dans l’Etat, qui nous oriente elle-même vers… France Télécom. Rien non plus à la Caisse des dépôts et consignations pourtant actionnaire à 51% du FSI. Au bout de la chaîne, au cabinet de Christine Lagarde, nos requêtes sont pour l’instant restées vaines.

Sollicité pour répondre à nos questions, Orange n’a pas souhaité s’exprimer. Tout juste peut-on rappeler que Didier Lombard, démissionnaire de la présidence de France Télécom, aurait été poussé vers la sortie lors d’un conseil d’administration le 23 février dernier. La raison? Il pourrait bien s’agir du dossier tunisien.

Document Orange-Tunisie OWNI


Enquête réalisée avec l’aide de Andréa Fradin, Sylvain Lapoix, et David Servenay
Visualisation par Elsa Secco et Marion Boucharlat

-
Téléchargez I’image de Une par Marion Boucharlat /-)

Retrouvez les articles de la Une “le business des télécoms au Magrheb” :

Le bon filon des télécoms maghrébins
Lebara, opérateur low cost des quartiers populaires

]]>
http://owni.fr/2011/03/03/ben-ali-les-compromission-dorange-en-tunisie/feed/ 73
Quelles perspectives pour la licence globale ? http://owni.fr/2010/11/03/quelles-perspectives-pour-la-licence-globale/ http://owni.fr/2010/11/03/quelles-perspectives-pour-la-licence-globale/#comments Wed, 03 Nov 2010 13:24:33 +0000 Mick Bergeron http://owni.fr/?p=27641 Michael Bergeron est étudiant à l’université de Sherbrooke au Canada, où il travaille sur les liens entre commerce électronique et industrie musicale. Il partage ses réflexions sur son blog, www.mickbergeron.com.

Il nous livre aujourd’hui son point de vue de québécois sur la licence globale.

Petit Québécois que vous êtes, vous ne connaissez peut-être pas le concept de licence globale. Cela provient de nos petits cousins de l’autre côté de l’océan. Une idée pour contrer une fois pour tout le piratage et le téléchargement illégal. Une solution qui serait enfin supportée par le gouvernement concernant l’industrie de la musique. Le concept de licence globale est divisé en 3 mentalités :

1- De type « universelle » : Les fournisseurs d’accès à Internet à travers le monde prélèvent un montant précis à chaque abonné ayant une connexion à haut débit. Que l’abonné télécharge ou non.

2- De type « optionnelle » : L’abonné décide de payer ou non un montant précis. Des peines sévères peuvent être engendrées pour ceux qui téléchargent sans débourser le montant demandé par les fournisseurs d’accès à Internet.

3- De type « à palier » : Un montant à prélever par les fournisseurs d’accès à Internet à travers le monde selon le volume de fichiers téléchargés. Donc, ceux qui ne téléchargent pas ne payent pas et vice-versa.

Licence globale, un beau concept sur le papier

Évidemment, l’idée est intéressante sur plusieurs points de vue : les maisons de disque pourraient rentabiliser la musique et les artistes. Cependant, l’idée ne sera jamais supportée globalement. Pourquoi ? Parce que :

1- Les lois et technologies à travers les différents pays ne sont tout de même pas aux mêmes endroits. Le Canada par exemple est très en retard, en comparaison avec plusieurs pays, sur les lois en lien avec le téléchargement et les droits d’auteurs.

2- Politique + bureaucratie + gestion = problèmes sur toute la ligne. Mettre en place une interface globale demande une énorme capacité de gestion, de temps, de ressources financières et humaines. Bref, pratiquement irréalisable à grande échelle.

3- La redistribution aux artistes est un énorme point d’interrogation. Comment et qui décide du montant qu’un artiste peut recevoir. Il n’a aucun moyen de réellement connaitre la part de chacun des artistes.

4- Des pertes d’emplois… : La licence globale rend désuets et superflus de nombreux postes dans le bout en bout de la création d’un produit musicale. Beaucoup d’artistes ne voudront plus se risquer dans la création physique d’album et même si ce support devient de plus en plus « dinosaure », l’industrie n’est pas prête à s’en débarrasser immédiatement. Alors, c’est toute une industrie qui sera chamboulée et non seulement freinée (en comparaison avec le téléchargement illégal).

Le sujet du moment dans l’industrie de la musique

Comment rentabiliser le tout. L’industrie s’avoue pratiquement vaincu devant le téléchargement illégal, pas seulement ce fait, mais aussi le téléchargement et le streaming gratuit qui prend de plus en plus de place. Alors, comment donner de l’argent à l’artiste, au distributeur, etc. Cela amène donc à avoir des solutions comme la « licence globale », par contre, on se rend rapidement contre que cette solution est invraisemblable.

Steve Jobs, toujours l’homme de la situation ?

Bien que l’idée de base tourne depuis un petit moment sur la toile, la solution que Steve Jobs veut amener permettrait de contrer le piratage tout en monétisant l’industrie. Un montant X par mois pour avoir accès à la totalité de la musique d’iTunes Store. En fait, Apple n’est pas le seul à avoir eu cette idée : Rhapsody, Napster et même le service de Zune permettent déjà d’utiliser ce genre de service. Alors pourquoi Apple fonctionnerait plus que les autres? Parce qu’iTunes est LE grand joueur. Avant tout, iTunes possède près du double de chansons disponible en comparaison avec Napster. Il faut dire aussi que la musique de Rhapsody ne fonctionne pas sur iPod. Ouf.

Licence globale ou pas ?

Non. Du moins, pas pour le moment. Cependant, la proposition de Steve Jobs d’offrir un montant à payer par mois devient déjà plus acceptable et réaliste. Surtout en considérant Apple comme un des plus gros joueurs dans le domaine de la musique maintenant et possède l’influence nécessaire de faire bouger les choses. Au final, un montant pas mois pour avoir la musique illimitée est vraiment intéressant, mais prendra du temps à être vraiment utilisé de façon efficiente et efficace comme modèle d’affaire et de monétisation.

Article initialement publié sur mickbergeron.com

Crédits photos : Mick Bergeron & FlickR CC benadamson TechShowNetwork

]]>
http://owni.fr/2010/11/03/quelles-perspectives-pour-la-licence-globale/feed/ 3
De l’open à la freedata http://owni.fr/2010/09/20/de-l%e2%80%99open-a-la-freedata/ http://owni.fr/2010/09/20/de-l%e2%80%99open-a-la-freedata/#comments Mon, 20 Sep 2010 12:00:59 +0000 Julie Rieg http://owni.fr/?p=28617 On évoque souvent la nécessité de libérer davantage la donnée publique. Et si on se penchait sur les données publiques déjà disponibles dont on ignore même l’existence ? Car Internet a aussi bien une face cachée qu’une face visible. La partie visible est traitée par les moteurs de recherche les plus courants, comme Google ou Yahoo qui brassent pas loin de 167 téraoctets d’informations. En deçà, pas moins de 91.000 téraoctets (500 fois plus) sont camouflés entre les pages dynamiques, les données privées, et bien d’autres encore. Ce qu’il y a de plus cocasse, c’est que certains fichiers peuvent être disponibles sans que pour autant vous puissiez les utiliser car la loi ne vous y autorise pas.

Entre le droit des données publiques, le droit d’auteur, le droit des données personnelles et le droit qui s’applique à la structure des bases de données, pas facile de s’y retrouver. D’autant plus que la loi qui s’applique aux données publiques ne prend pas en compte le cas de la donnée publique « ouverte ». Trois starts-up (Araok, Nexedi et Talend) lancent Data Publica, annuaire de données publiques en France mis en place dans le cadre de l’Initiative Services Mobiles et présenté hier à la Cantine, et réfléchissent à des licences paramétrables conçues spécifiquement au regard de ces droits, de la nature des données et de la volonté de l’éditeur. Cette approche personnalisée s’inspire des licences creative commons ou encore des open database licences qui s’appliquent spécifiquement aux bases de données. Ces mêmes perspectives ont été soulignées l’année dernière par Jérôme Giusti, avocat au barreau de Paris, pour pallier à ce méli-mélo juridique.

Une logique de protection de la co-production

Recenser les données et créer des licences plurielles, Data Publica ne pouvait pas mieux tomber alors que les démarches de mises à disposition des données publiques fleurissent aux quatre coins de la planète. L’histoire a commencé aux États-Unis, impulsée par le gouvernement d’Obama. Un battement d’aile qui crée son tsunami à travers le monde. Depuis, l’Angleterre, l’Australie, le Japon, les pays nordiques et même la France s’y mettent. Pour autant, on ne sait pas très bien comment s’y prendre, quelles règles mettre en place et comment communiquer sur le sujet.

De-ci de-là, on entend aussi bien parler “d’ouverture” que de “libération” de la donnée. Dans le monde du logiciel, une différence très nette est faite entre l’open-software et le free-software. Le premier ne donne aucune paternité aux modifications du logiciel réalisées au fur et à mesure, le risque étant qu’un leader du marché s’en empare et en fasse sa propriété. A contrario, la logique de free-software identifie chaque participant et propose des licences creative commons pour chacune de leur intervention, soit une logique de protection de la co-production (voir la vidéo de Eben Moglen, professeur de droit et d’histoire du droit à l’école de droit de Columbia, avocat conseil de la Free Software Foundation et président du Software Freedom Law Center, sur ce sujet). Serions-nous en train d’acter le passage de l’opendata vers la freedata ?

Billet initialement publié sur le blog du Groupe Chronos

Image CC Flickr adulau

]]>
http://owni.fr/2010/09/20/de-l%e2%80%99open-a-la-freedata/feed/ 0
Libérons les données ! De quelques aspects juridiques http://owni.fr/2010/03/05/liberons-les-donnees-de-quelques-aspects-juridiques/ http://owni.fr/2010/03/05/liberons-les-donnees-de-quelques-aspects-juridiques/#comments Fri, 05 Mar 2010 15:46:03 +0000 Michèle Battisti http://owni.fr/?p=9468 data

A l’heure où l’on évoque la libération des données publiques [1] et le Web des données [2], ou encore le data journalisme, il semblait utile d’approfondir cette question que l’on avait abordée en 2006 pour les données de la recherche.

Les enjeux

Dans le domaine scientifique, il est essentiel de partager les informations. Pouvoir reconnaître la qualité de  biens collectifs aux résultats de la recherche devient donc un impératif. Quant au Web de données, autre exemple retenu, il implique que l’on puisse relier et interroger de manière simple les données dispersées sur le web [3], mais aussi d’en disposer sans se heurter à des obstacles juridiques.

Or,  pour accéder à des  données et avoir le droit de les utiliser, on s’aperçoit qu’il faut bien  souvent contacter les ayants droit et négocier des licences, ce qui s’avère généralement lent et coûteux.

Pour pallier les risques croissants de réappropriation des données, liés à  l’expansion actuelle de la propriété intellectuelle, ont été développées parallèlement, depuis plusieurs années, des approches techniques et juridiques dites « ouvertes ».

Les données libres et ouvertes permettent ainsi de disposer d’un fonds commun de données dans lequel n’importe qui peut puiser et ce, malgré les différences importantes des contextes juridiques et institutionnels de leur création.

Quelques rappels

DÉFINITIONS

donnée : un fait, notion ou instruction représentée sous forme conventionnelle convenant à la communication, l’interprétation ou au traitement par des moyens humains ou automatiques (afnor)

donnée publique : donnée collectée ou produite dans le cadre de sa mission, par un service public, sur des fonds publics.

donnée libre : une donnée que l’on est libre d’utiliser, de modifier et de rediffuser

donnée ouverte : l’ouverture s’applique la notion d’interopérabilité, assurée par des standards.

licence libre : contrat par lequel un titulaire d’un droit de propriété intellectuelle concède à un tiers tout ou une partie de la jouissance d’un droit, en accordant au moins la possibilité de modifier, de rediffuser et de réutiliser l’œuvre dans des œuvres dérivées. Ces libertés peuvent êtres soumises à conditions [4] (Wikipédia).

domaine public : des œuvres protégées par le droit d’auteur dont la durée des droits patrimoniaux a expiré (droit d’auteur) ou des choses communes qui n’appartiennent à personne mais dont l’usage est commun à tous  (art. 714 Code civil).

LE CADRE JURIDIQUE

Le droit d’auteur. Les données « brutes » ne sont  pas protégées par le droit d’auteur, mais leur mise en forme (sous forme de graphiques, diagrammes,  etc.) pourrait l’être, dès lors que celle-ci s’avère originale et que la présentation des données ne découle pas automatiquement de l’utilisation d’un procédé technique ou d’un logiciel. Si, par ailleurs, la structure et choix des données sont originaux, la base de données sera protégée par le droit d’auteur.

Le droit sui generis des bases de données. Si le producteur de la base de  données peut en outre prouver avoir investi de manière substantielle pour constituer et gérer sa base, il peut s’opposer à toute extraction ou réutilisation substantielle de celle-ci.

Le droit de réutilisation des données publiques. Dans ce cadre, l’administration met à la disposition du public les données qu’elle a produites ou qu’elle détient [5].

D’autres mécanismes.  L’accès aux données peut être protégé a priori par un contrat et a posteriori par une action en concurrence déloyale, pour parasitisme ou pour enrichissement sans cause.

Libérer les données

Pourquoi adopter une licence ?

Même dans le cas où les données ne sont pas protégées par un droit (droit d’auteur, droit sui generis du producteur de base de données), il est recommandé de les diffuser accompagnées d’un contrat de  licence.

Les utilisateurs ont, en effet, besoin de savoir d’où viennent les données (notion d’attribution), si celles-ci elles ont été modifiées (souci d’intégrité et de validation) et de connaître toutes les modalités de réutilisation autorisées.

Les recours à des contrats de licences reconnus dans le monde entier, même si celles-ci nécessitent une adaptation au droit national, permet d’organiser le partage des données en évitant,  puisque les contrats sont la loi des parties, de se pencher sur le problème de la loi applicable et de se heurter à des concepts juridiques différents.

L’extrême diversité des licences

Dans son rapport, le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) note qu’il existe des œuvres sous licences mixtes (contenant des éléments sous licences libres et d’autres sous contrats propriétaires) ou encore des licences doubles (permettant d’opter soit pour une licence libre qui impose certaines contraintes, soit pour une licence propriétaire).

A côté des « domaines historiques d’expansion » que sont les logiciels libres, des modèles « généralistes » (licences Creative Commons ou Art Libre, par exemple), diverses communautés (informaticiens, chercheurs [6], musiciens, …) ont développé des licences qui répondent à leurs priorités. En outre, afin de les améliorer, pour s’adapter à de nouvelles pratiques ou de nouvelles législations, ces licences ont  pu évoluer dans le temps  et se présenter sous de nouvelles versions numérotées [7].  Le mouvement ne s’est étendu qu’ensuite et  plus récemment aux données [8].

Quelle licence choisir ?

Pour s’assurer que les données restent libres et bâtir un fonds commun de données,  il est important de  pouvoir contrôler leurs usages. Abandonner tous ses droits de manière anticipée, en choisissant une licence qui fait  entrer son œuvre dans le domaine public (comme l’Open Data Commons – Public Domain Dedication & Licence (PPDL) ou la licence CC Zéro), permet certes de les utiliser pour créer des œuvres dérivées, mais  ne répond pas obligatoirement à un tel objectif, puisqu’il n’oblige pas à partager les résultats obtenus à partir des données utilisées. N’importe qui, une entreprise par exemple, pourrait se réapproprier ces données, d’où le paradoxe qui consiste à créer un droit de propriété, qui ne devrait pas exister, pour empêcher cette action.

Si l’on entend bâtir un fonds commun de collaboration, il s’avère de ce fait   prudent d’adopter une logique de  Copyleft qui « force » le partage. Classées dans le rapport du CSPLA parmi  les licences offrant une liberté pérenne, les licences Copyleft[9] ne « se limitent pas à l’octroi du droit d’utiliser, de modifier et de diffuser l’oeuvre : elles veillent à ce que l’usage de l’œuvre copiée ou modifiée demeure libre. Dès lors que sont combinés les éléments de l’oeuvre mise à disposition, l’oeuvre seconde devra obéir au même régime », ce qui permet de s’assurer de l’existence d’un fonds commun d’oeuvres que l’on peut utiliser librement.

La licence Creative Commons BY-SA[10] qui oblige à citer la source et à partager les données obtenues à partir des données utilisées sous la même licence CC BY-SA, a été adoptée notamment par les concepteurs du projet OpenStreetMap, projet qui connaît un grand succès, qui vise à cartographier des villes à partir de données géographiques libres. Considérant toutefois qu’une licence CC vise à protéger des œuvres protégées par le droit d’auteur, les concepteurs d’OpenStreetMap songent à adopter la licence ODbL, adaptée au droit sui generis des bases de données

Le choix d’une licence n’est pas neutre

S’il convient, en préalable, de s’assurer que l’on est en mesure de céder tous les droits que la licence va conférer (coauteurs éventuels, droits d’auteur sur les œuvres incorporées, …), il convient aussi  d’en apprécier l’impact avant d’opter pour l’une d’entre elles.

Kobé

Mes plus vifs remerciements à Benjamin Jean, Linagora

Ce texte sera également publié sur le site de l’ADBS


Notes

[1] Les portails gouvernementaux en Australie, aux Etats-Unis, ou encore au Royaume-Uni proposent tous des données en libre accès. Mais ces portails seraient moins riches en données que le portail français, tel que préfiguré aujourd’hui. Le niveau « d’ouverture » des données publiques accessibles via le portail  français d’accès aux données publiques annoncé par l’Agence du patrimoine immatériel de l’Etat (APIE), variera selon les administrations. Le Chapitre français Creative Commons a interrogé les candidats aux élections  régionales pour les sensibiliser à l’utilité de libérer les données publiques régionales.

[2] Voir aussi : L’avenir de l’information : le web de données, Hubert Guillaud, InternetActu.net, 4 décembre 2008

[3] Démontrant ainsi la nécessité de l’intéropérabilité,  une condition facilitée par le mouvement Libre.

[4] La licence libre  GPL (General Public License), par exemple, impose que l’on redistribue le logiciel « enrichi » après l’avoir récupéré, étudié et amélioré.

[5] Le principe d’une réutilisation des informations publiques ne s’applique pas  aux informations élaborées dans le cadre d’une mission de service public à caractère industriel et commercial,  ni à  celles dont les tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle, ni à  celles qui contiennent des données personnelles non anonymisées lorsque l’accord des personnes concernées n’a pas pu être obtenu.

[6] Des licences spécifiques ont été développées pour certaines disciplines, BiOS Open source dans le domaine des biotechnologies, par exemple.

[7] La version 3.0 des licences Creative Commons, par exemple, tient  compte du droit sui generis qui peut être conféré à certains producteurs de bases de données.

[8] Les réflexions autour des Science Commons [12] et le succès d’OpenStreetMap [17] ont joué à cet égard un rôle majeur

[9] La licence CC BY SA ou la licence Art Libre, par exemple

[10] Licence CC qui oblige à mentionner la source (BY)  qui autorise les modifications, mais qui impose que les oeuvres dérivées soient proposées au public avec les mêmes options Creative Commons que l’œuvre originale.

Références

1.       Rennes et Keolis: ils ont osé ! LiberTic, 1er mars 2010

2.       Vers des données régionales en libre accès, Michaël Szadkowski, blog du Monde, 10 février 2010

3.       Rennes passe à l’open source pour diffuser ses infos pratiques, Christophe Guillemin, 01Net, 24 février 2010
4.       Atelier Communia « Les institutions de mémoire et le domaine public » – Barcelone 1 & 2 oct. 2009 (Compte-rendu et impressions), Calimaq,  S.I.Lex, 13 octobre 2009

5.       The legal status of raw data : a guide for research practice, Madeleine de Cock Buning, Allard Ringnalda, CIER and Tina van der Linden (Centre for Intellectual Property Law,  Surf  Foundation, July 2009

6.       La mise à disposition ouverte des œuvres de l’esprit, Valérie-Laure Bénabou et Joëlle Farchy, Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique juin 2007

7.       CC0 : une nouvelle licence Creative Commons pour « marquer » le domaine public en ligne , Calimaq, S.I.Lex, 17 mars 2009

8.       Mon œuvre est dans le domaine public, Michèle Battisti, Actualités du droit de l’information,   16 mars 2009

9.       (Petit) Guide à l’usage des licences libres, Benjamin Jean, Intervention lors de la matinée juridique, Syntec informatique du 14 mars 2008.

10.    Comment puis-je mettre mes documents sous licence Creative Commons ? Michèle Battisti, Actualités du droit de l’information, janvier 2008

11.    Principes pour des données publiques ouvertes, Hubert Guillaud Internet Actu, 20 décembre 2007

12.    Science Commons : une solution pour le partage des résultats scientifiques, Michèle Battisti avec la collaboration d’Arabelle Baudette, Actualités du droit de l’information, n° 67, mars 2006

13.    Les contrats Creative Commons, Michèle Battisti, Actualités du droit de l’information, n° 52, novembre 2004

Définitions. Guide

14. Open Definition. Un tableau des licences. Sur le site Open Definition

15. Guide to Open Data Licensing. Sur le site Open Knowledge Foundation Wiki

16. Openstreetmap. Sur le site Wikipédia

Présentations ppt

17. Le statut juridique de la donnée libre, Benjamin Jean, Linagora, 17 septembre 2008

18. Data sharing : social and normative, Kaitlin Thaney,  25 octobre 2009

19. Rights Statements on the Web of Data, Leigh Dodds, 25th October 2009

Présentation audiovisuelle

20. Le web des données. Emmanuelle Bermès, 5 à 7, ADBS (en ligne prochainement)

Billet initialement publié sur Paralipomènes

Image bionicteaching sur Flickr

]]>
http://owni.fr/2010/03/05/liberons-les-donnees-de-quelques-aspects-juridiques/feed/ 2