Laurence a reçu une lettre. Une lettre de l’inspecteur d’académie. Dans sa lettre l’inspecteur lui écrit:
Laurence, si vous ne vous sentez pas capable de faire ce métier, il faut démissionner.
C’est vrai quoi, les places sont chères, et il y a sûrement plein de Claire qui attendent un poste. Dans sa lettre l’inspecteur lui écrit aussi :
Laurence, les elèves ont le droit d’avoir devant eux des enseignants compétents.
C’est vrai quoi, surtout quand il s’agit d’élèves difficiles.
Oui mais voilà. Laurence, elle avait envie et tout aussi certainement besoin de faire ce métier. Apprendre le programme d’histoire ou de mathématiques ou de français, ça Laurence y est très bien arrivée. C’est une partie du métier qu’elle avait choisi. Mais apprendre comment on fait passer un programme d’histoire, de mathématiques ou de français à une classe de 32 élèves de 13 ou 14 ans, ça, on ne le lui apprend plus à Laurence. On la met devant les élèves, on lui colle un “tuteur” enseignant – qui n’est souvent même pas dans le même lycée ou collège qu’elle – et on lui dit débrouille-toi Laurence.
Messieurs.
–Monsieur l’inspecteur d’académie dont je ne connais pas le nom,
–Monsieur Luc Châtel, ministre du management national et de l’éradication nationale des psychologues scolaires**,
–Monsieur Xavier Darcos, ancien ministre de l’éradication nationale de la formation des enseignants,
Vous avez tous les trois des métiers qui doivent certains jours vous paraître aussi difficiles que celui de Laurence. J’ignore si vous êtes ou si vous avez été sous anxiolytique. Que vous portiez tous les trois l’écrasante responsabilité de l’effondrement programmé d’un système, celui de l’instruction publique, passe encore. Que vous ou votre mentor, vous réclamiez régulièrement de l’héritage de Jaurès ou de Jules Ferry, passe encore. Vous pouvez “jouir pleinement de la supériorité reconnue que les chiens vivants ont sur les lions morts” (Jean-Paul Sartre). Après tout, vous êtes nommés ministres ou inspecteur, vous êtes convaincus que le secteur privé peut assurer des missions qui incombaient jusqu’ici aux services publics, dans l’éducation comme ailleurs, et vous mettez en oeuvre le programme permettant de faire aboutir vos idées. Donc acte. “C’est le jeu”. Mais la lettre que vous venez tous les trois d’envoyer à Laurence signe la fin de la partie.
Avec cette lettre cesse le jeu et commence l’indéfendable. Supprimer la formation des maîtres, placer ces nouveaux maîtres “dans des classes”, attendre que certains d’entre eux s’effondrent, et leur signifier par courier hiérarchique que “les élèves ont le droit d’avoir devant eux des enseignants compétents” et que le cas échéant ils feraient mieux “de démissionner”, est une stratégie managériale ayant effectivement déjà fait ses preuves, et dont l’avantage est de révéler à ceux qui l’ignoreraient encore l’étymologie du mot “cynisme”. Comme des chiens. Vous avez, “messieurs qu’on nomme grands”, merveilleusement contribué à l’enrichissement de l’horizon sémantique du cynisme : ce qui était au départ le seul mépris des convenances sociales, désignera désormais également le total et absolu mépris de l’humain.
Un nouveau cynisme dont l’alpha et l’oméga est constitué de la seule doctrine managériale. Une machinerie implacable, chez France Télécom comme dans l’éducation nationale désormais, qui fabrique des Laurence dans le seul but de les broyer, pour s’économiser l’annonce d’un énième plan social, pour accélérer encore un peu le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.
Vous avez, messieurs, parfaitement raison sur un point : les élèves ont le droit d’avoir devant eux des enseignants compétents. Mais vous avez patiemment, minutieusement, laborieusement transformé l’école de la république en un immense tube digestif. Une machine à bouffer de l’humain.
D’un tube digestif il ne peut sortir que de la merde. C’est pas du management, c’est de la biologie.
J’ai souvenir d’une école de la république d’où sortaient des citoyens.
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Article initialement publié sur Affordance.info
Illustration CC FlickR par …::: Antman :::…
]]>Mettre fin à un fichier tentaculaire, en ces temps de frénésie orwellienne et de disette budgétaire, c’est l’exception qui confirme la règle. Car ailleurs en Europe, des tentatives similaires existent pour créer, au niveau local ou national, des « fichiers de la jeunesse ». Ces registres ne sont pas forcément liés à la scolarité, parfois ce sont les services d’aide à l’enfance qui forment le premier maillon du fichage étatique. Mais la tendance est clairement de s’immiscer au plus tôt dans la vie des enfants pour repérer ceux qui s’écarteront du « droit chemin »…
En France, l’exemple britannique fait des jaloux. Le CNRBE, un collectif d’enseignants, de citoyens et de parents opposés au fichier “Base élèves” (valable dans les écoles primaires), a gagné une bataille en juillet devant le Conseil d’État. Mais pas question que l’Éducation nationale débranche Base élèves… Le ministère devrait opérer de simples réajustements règlementaires pour répondre aux critiques du Conseil d’État.
En Grande-Bretagne, Contact Point est la première victime des promesses vertueuses du nouveau pouvoir. Dès son premier discours, le vice-Premier ministre Nick Clegg jurait d’en finir avec la « société de surveillance » si décriée dans la patrie de George Orwell. Contact Point, qui recense les dossiers individuels de 11 millions d’enfants (de leur naissance à 18 ans), n’a jamais vraiment convaincu ni les professionnels, ni les usagers.
Imaginé dès 2001 par le gouvernement de Tony Blair, sa ministre de l’Éducation, Margaret Hodge (devenue plus tard « ministre de l’Enfance »), lancera l’application en 2004. Appelé à l’origine « Universal Child Database », Contact Point a été maintes fois critiqué autant par les défenseurs de la vie privée que des services sociaux.
Si le gouvernement est parvenu à faire passer la pilule, c’est sans doute grâce à un fait-divers crapuleux. En 2000, une petite fille de 8 ans, Victoria Climbie, est retrouvée morte après avoir subi violences et actes de torture. Sa tante et son compagnon seront reconnus coupables en février 2003. Quelques jours avant le verdict, un rapport d’inspection concluait à d’énormes lacunes dans l’aide à l’enfance : la petite Victoria avait été vue et entendue par une foule de médecins et d’assistantes sociales sans que personne n’ait rien repéré. « L’affaire Victoria Climbie a clairement permis au gouvernement d’étouffer ces critiques », analyse Terri Dowty, directeur de l’association Action on Rights for Children (ARCH).
« Contact Point avait deux finalités : recenser les besoins éducatifs et médicaux de chaque enfant, et signaler les cas de maltraitance », précise-t-il . On y trouve des données d’état-civil, ceux des parents, et les contacts de l’enfant avec tous les services sociaux — santé, éducation, protection de l’enfance… N’importe quel praticien (du dentiste à la nounou) y était mentionné. Mais finalement, constate Dowty, la mission « protection de l’enfance » a été délaissée… « La faible proportion d’enfants réellement en danger (0,26% du total) étaient noyés dans un océan de données insignifiantes… C’était comme trouver une aiguille dans une botte de foin !» D’autant que depuis le lancement de Contact Point, « les services d’inspection ont rapporté une hausse des cas de négligence de la part des agents de la protection de l’enfance ».
Dans le même temps, les services sociaux ont dû essuyer de larges coupes dans leurs effectifs. « L’argent dépensé dans les bases de données s’est fait au détriment du personnel. Conséquence, il y a une pénurie de travailleurs sociaux qualifiés dans la protection de l’enfance. On estime qu’il nous manque des milliers de spécialistes et 40% des agents actuels disent être débordés par un trop-plein de dossiers à traiter. »
La fin programmée de Contact Point ne serait pourtant qu’une illusion. Terri Dowty explique qu’une autre application fait surface : « National eCAF » (National electronic Common Assessment Framework). Son rôle est à peu près identique à celui de Contact Point, la protection de l’enfance en moins : un dossier individuel sur chaque enfant pour gérer ses liens avec les services sociaux. Déjà effectif sous forme papier au niveau local, le projet est de numériser les procédures et de créer une seule base centrale. « Un système national n’est pas du tout justifiée. eCAF, pour nous, est la prochaine cible de nos préoccupations », testé depuis mars 2010. Soit juste avant l’arrivée de la nouvelle coalition, qui n’en a pas dit un mot depuis sa prise de fonction…
Dans une récente note, ARCH s’inquiète du caractère discriminatoire de ce fichier. « Le mot « approprié », conçu pour faire passer des opinions subjectives comme de simples observations, apparaît 21 fois. Ainsi un praticien devra dire si l’enfant a des « relations amicales appropriées », s’il a un « comportement appropriée », ou si ses parents ont une sensibilité ou un sens affectif « approprié »… »
En Allemagne, en Autriche et aux Pays-Bas, on est sur la même longueur d’ondes. En 2007, les Big Brother Awards autrichiens ont distingué la ministre de l’Éducation de l’époque, Claudia Forger (sociale-démocrate), à l’origine d’une base de données scolaires qui, comme la Base élèves en France à ses débuts, prend prétexte d’assurer un « suivi pédagogique » pour recenser des données plus sensibles comme les exclusions d’école, les préférences religieuses, les besoins de soutien scolaire Le tout alimenté par un identifiant unique analogue à notre « numéro de sécu ».
Aux Pays-Bas, on se rapproche de l’usine à gaz Contact Point, avec un « fichier électronique de l’enfant », qui mélange allègrement cas de maltraitance, données sociales, médicales (dont l’usage de drogues ou leur santé mentale…) et compétences professionnelles… Un fichier dont la gestion a été confiée à un grand « ministère de la Jeunesse et de la Famille » et qui est, lui aussi, d’envergure nationale.
En Allemagne, les tentatives de créer un identifiant unique, au niveau fédéral, se sont pour l’instant heurtées à une opposition institutionnelle : l’éducation est la compétence exclusive des Länder. « Mais chaque Land, l’un après l’autre, est en train de créer son propre fichier des élèves centralisé », constate Susanne Heß, juriste et membre de l’association de défense des données personnelles FoeBud.
C’est la ville-État de Hambourg qui a ouvert le bal, en 2007. Sa ministre de l’Éducation, Alexandra Dinges-Dierig, est devenue célèbre pour la création du «Schülerzentralregister» (registre central des élèves). Le « suivi pédagogique » avait bon dos, car ce registre a été utilisé pour traquer une famille en situation irrégulière. « La recherche d’enfants sans papiers est l’une des finalités du [registre central], comme le parti démocrate chrétien (CDU) de Hambourg l’avait demandé » accusait la FoeBud en 2007 (lire une version française sur le site de la LDH de Toulon)
Dernière région à succomber : la Bavière. Une loi votée le 19 mai dernier oblige toutes les écoles à mettre leurs propres fichiers accessibles aux autorités régionales. L’idée d’un identifiant unique pour tout élève bavarois a pour l’instant capoté.
À Berlin (ville-État comme Hambourg), un tel fichier scolaire existe depuis 2009, mais les choses prennent une tournure plus policière. La ministre de la Justice du Land, Gisela von der Aue, exige que le registre scolaire puisse servir à détecter la fraude et prévenir la délinquance juvénile. Même si les forces de police n’ont pas (encore ?) d’accès direct au fichier… Dans le Brandebourg, un état de l’ex-RDA (proche de Berlin), en mai 2010 les autorités ont lancé un chantier similaire pour une mise en place à la rentrée 2012.
« Les arguments pour justifier ces fichiers sont toujours les mêmes : réduire les coûts et la paperasse, optimiser les ressources, tout en vérifiant l’assiduité scolaire », poursuit Susanne Heß. « Mais ces fichiers contiennent des infos sensibles comme leur origine ethnique, les langues pratiquées ou leurs préférences religieuses… »
Ces arguments sont exactement ceux déployés, depuis cinq ans, par le ministère français de l’Éducation pour “vendre” Base élèves aux citoyens. Les garde-fous sont trompeurs. Le CNRBE regrette, comme ici en avril dernier, de ne pas être assez soutenu par la CNIL, l’autorité de protection des données, qui n’a jamais daigné contredire le ministère sur la base élèves. Par exemple sur la question du consentement des parents : pour la Commission, “l’école est obligatoire, alors le fichier l’est aussi”. Sur ce point et bien d’autres, le Conseil d’État, dans son jugement de juillet, a donné raison aux opposants en rétablissant ce “droit d’opposition”. Une brèche dans laquelle le collectif n’a pas manqué de s’engouffrer en publiant le 31 août un modèle de lettre d’opposition que les parents d’élèves pourront remettre au directeur d’école le premier jour de la rentrée.
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Merci à Susanne Heß pour son aide précieuse.
Pour compléter :
À propos du système « eCAF », une vidéo de l’ONG ARCH (en anglais)
Cliquer ici pour voir la vidéo.
Crédit images CNRBE (droits réservés) et CC Flickr Tim Morgan ; grande une Elsa Secco Creative Commons
]]>Sachant combien les places sont chères (une quarantaine) et les aspirants nombreux (des centaines), c’était un peu ma nouvelle star à moi, les sorties d’André Manoukian en moins.
Trêve de comparaisons hasardeuses. Voir ces petits jeunes (22-24 ans en général) pousser pour entrer dans la profession m’a donné les crocs. Leur faim du métier alimente mon plaisir de le pratiquer. Après cette expérience, c’est donc l’enthousiasme qui prédomine… enfin presque. Résumé.
Il y a 6 ans, j’étais face au directeur de cette même école (et de ceux des autres écoles où j’avais candidaté), me voilà de l’autre côté de la table, représentant les « professionnels », les « recruteurs ». En une demi-journée, je vois ainsi passer neuf candidats.
On me demande de les noter après 15 mn de conversation. Mon jugement vient s’ajouter à leurs résultats aux autres épreuves. Mais si je leur attribue un 1 ou un 2 sur 10, je les élimine. Bref, à coté de moi les jurés de la Nouvelle Star ont des buzzers en chocolat.
Autant le dire tout de suite, j’ai « disqualifié » deux personnes en leur attribuant la note fatale. Ai-je été trop dur? Une fois les notes données, j’en ai parlé avec le directeur de l’école et avec les membres du jury d’actualité, qui précède celui de motivation. Et il se trouve que tous les jurés avaient mis des notes éliminatoires à ces deux « touristes ».
Pas préparés (pas de stage, pas de connaissance concrète d’un métier qu’ils fantasment), sans projet professionnel, ne connaissant pas l’état économique de la presse, ils n’avaient rien à faire là, et ne méritaient certainement pas de prendre une place dans la future promotion de l’IPJ.
Où aimeriez vous travailler si vous aviez le choix ?
« Aux pages politiques ou culturelles de Libé, je n’arrive pas à le décider »
(Humm comment te dire que dans 10 ans les pages politiques ou culture de Libé ça n’existera sans doute plus?)
Où vous voyez vous dans 10 ans?
« Je ne me projette pas. Au Brésil. En ce moment mon truc c’est les associations anti-pub. »
(Donc le journalisme en fait c’est pas ton truc?)
Je vous offre aussi cette perle (bonus):
« La philosophie est un type d’information [comme une autre], peut-être plus transcendantale et immanente, encore que… »
Les deux éliminés étaient des garçons. Et je dois dire que dans l’ensemble, les filles m’ont fait plus forte impression. Mieux préparées, bosseuses et enthousiastes, elles m’ont parues plus solides. Ce qui tendrait à donner raison à l’une de mes collègues, rédactrice chef à l’AEF, qui peste souvent contre la nonchalance des « mecs » stagiaires, qui donnent l’impression de ne rien avoir à prouver.
Un de ces jours je vais publier ma lettre de motivation pour l’entrée en école de journalisme. Je soupçonnais qu’elle n’était pas brillante, mais j’ai découvert que les candidats de 2010 l’ont copiée! En vrac, et quelles que soient les années, on veut devenir journaliste pour :
- Rencontrer des gens
- Diffuser l’information au plus grand nombre
- Éveiller les citoyens/être un rouage de la démocratie
- Dénoncer
- Rejoindre les glorieuses plumes qui nous ont précédé
…
Bref rien que de très prétentieux. Une candidate avait troussé une lettre rigolote mais elle n’a pas été la meilleure ensuite face à nous (la lecture de la lettre est effectuée juste avant l’oral). Comme quoi, ce n’est vraiment pas sur cet exercice formel que peut se jouer la sélection.
Tous les candidats (sauf nos deux touristes) avaient effectué des stages. Souvent dans la PQR (presse quotidienne régionale) ou dans la presse spécialisée, ce qui leur donne déjà un petit bagage. Non seulement ils ont écrit et fait du terrain, mais en plus ils ont très bien compris que la presse est en crise. Ils ont conscience qu’ils doivent se préparer à une entrée difficile sur le marché du travail et sont prêts à bosser à la pige.
A une ou deux exceptions notables, les candidats n’ont pas, semble-t-il, compris le bouleversement internet sur le journalisme. Comment pourrait-il en être autrement? Ils préparent leurs concours en « fichant » les journaux papiers et n’ont sans doute pas réalisé combien d’informations ils apprennent tous les jours en allant simplement sur leur compte Facebook.
Quant à Twitter, l’outil ne leur est pas familier (je crains qu’il en soit de même des flux RSS, de Delicious, des alertes Google et de tant d’autres outils « basiques »). Mention spéciale à cette étudiante, auteure d’un mémoire sur Facebook et Twitter, mais qui m’a confié ne pas avoir eu besoin de se créer un compte pour effectuer son enquête.
Une seule candidate nous a annoncé son projet de créer un site web cet été. Et elle a spontanément parlé du web comme d’un support permettant de mixer du texte, de la vidéo et du son.
Une phrase d’un autre candidat résume bien la relation de ces jeunes étudiants, marqués par leur culture universitaire (souvent en sciences humaines):
« Internet devient incontournable. Je me suis préparé à l’éventualité d’y travailler [mais bon ça me fait pas rêver »
Ah, j’allais oublier une réponse que j’ai (sincèrement) adorée:
Ma question : « A votre avis, où se trouve l’information aujourd’hui dans la presse quotidienne, à la radio, à la télé ou sur internet? »
Réponse : « Il me semble que l’information se prend sur le terrain et qu’après on la diffuse selon des canaux différents »
C’est sans doute ma plus grande interrogation. Deux candidats ont explicitement dit qu’ils préféraient « l’info neutre » à celle très partisane de la presse française. Les autres ont eu l’air de s’accommoder d’une tendance évidente à la polémique, au commentaire et au point de vue, formes qui prennent le pas sur l’information dans sa plus pure expression.
Je le regrette un peu mais je me dis que les cours qu’ils pourront suivre, en agence notamment, pourraient les « guérir » de cette tendance.
Je dois vous parler de cette enseignante qui après une première partie de vie professionnelle veut reprendre des études et devenir journaliste. Bof, me dites vous, pas étonnant, elle en a marre des élèves! Archi-faux. Si elle a obtenu une dérogation pour présenter le concours (elle a largement dépassé la limite d’âge) c’est pour de bonnes raisons.
Elle vit actuellement au Japon et va radicalement changer de vie pour intégrer l’école. Prévoyante, et organisée, elle a mis de l’argent de côté pour pouvoir organiser cette transition professionnelle. L’idée d’être journaliste la taraude depuis longtemps, mais elle voulait avoir vécu quelque chose avant de faire un tel métier.
A la fin de ses études elle ne se sentait pas légitime et a donc opté pour l’enseignement doublé de l’expatriation. Elle a réussi le tour de force d’être brillamment préparée pour le concours et de garder une spontanéité incroyable.
Deux candidats, un garçon et une fille, ont forcé mon admiration par leur volonté, démontrée en quelques minutes d’entretien.
Honneur aux dames:
Comment avez vous obtenu vos stages (Télérama, Itélé, Marianne…)?
« Je les ai harcelé. On m’avait dit qu’ils ne me prendraient pas, mais je n’ai pas arrêté de faire des demandes ».
Et comment avez vous interviewé Yasmina Benguigui?
« On m’avait dit que c’était impossible. Je n’ai pas arrêté de harceler sa secrétaire au téléphone et finalement elle m’a dit oui et m’a invitée dans son hôtel. »
Quant au jeune homme, recalé à l’oral l’an passé, il est revenu gonflé à bloc. Il a passé son année comme correspondant d’un grand quotidien régional alors qu’il n’avait pas d’expérience dans la presse. Il nous a montré son book et nous a très bien parlé du métier de journaliste.
Tous ne seront pas journalistes, mais j’espère que parmi les candidats que j’ai notés, certains accéderont à une école reconnue, meilleur moyen de se lancer. Je leur souhaite de garder les étoiles que j’ai vues dans les yeux et la volonté qui semblait les habiter.
Je leur recommande de garder les pieds sur terre, de vite se mette aux outils du web et de réfléchir à exploiter ses potentialités. Et je les supplie de se concentrer sur l’info et de renoncer au commentaire et à l’éditorialisme qui abime notre presse.
Ah oui, j’espère aussi que certains viendront toquer à la porte de la super agence de presse qui monte, la mienne. Histoire d’aiguillonner ma motivation !
Pour terminer, il faut saluer et citer le bel effort de transparence de l’IPJ, qui a mis en ligne un guide bien fait pour se préparer au concours d’entrée. Lecture recommandée.
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Billet originellement publié sur MonJournalisme.fr.
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