Ou encore le chemin évolutif linéaire qui débouche sur l’humain :
Cliquer ici pour voir la vidéo.
Pas étonnant ensuite que quelques confusions s’installent, mises en dérision dans cet épisode de South Park :
Cliquer ici pour voir la vidéo.
Et oui, si on imagine que l’évolution a un sens et gravis une échelle du progrès, échelon par échelon, dont nous serions l’apogée, on se retrouve à douter sérieusement de sa validité. C’est ce genre de représentation de l’évolution qui mène beaucoup de personnes à se poser des questions du genre : si l’évolution tend vers l’humain, comment se fait-il qu’il existe encore des espèces moins évoluées ?
Heureusement, scientifiques et bloggeurs (comme Marion Sabourdy ou Mr Ocean Electrique) se mettent de plus en plus à traiter de la question pour chasser des esprits ces idées fausses.
Je répète ce qui a déjà été dit dans leurs billets : l’évolution ne se dirige pas dans un sens particulier. Il n’y a pas de progrès préconçu dans l’évolution. L’évolution va dans toutes les directions, contrainte uniquement par les changements génétiques aléatoires qui sont transmis au cours de la reproduction des organismes, ainsi que par la sélection naturelle qui élimine les individus non adaptés aux conditions de survie et de reproduction dans un contexte donné. Au grès de ces contraintes, les espèces vont évoluer et peuvent changer drastiquement de morphologie, de stratégie de survie, de degré de complexité, dans tous les sens possibles !
C’est à mon tour de m’atteler donc à la démystification de la représentation linéaire de l’évolution, mais on va faire ça SSAFT style, avec une jolie convergence évolutive !
Parlons donc de la transition des vertébrés aquatiques vers des vertébrés terrestres. Selon le schéma horrible ci-dessus, cette transition ne se serait effectué qu’une fois, de poisson à tétrapode, pour que le chemin de la perfection mène vers notre bonne bouille d’Homo sapiens. Si vous avez bien suivi, vous avez maintenant compris que, puisque l’évolution ne favorise pas un sens particulier, cette transition n’est qu’un chemin parmi d’autres qui dans ce cas précis, a mené à l’émergence des animaux tétrapodes, mais qui dans un autre a pu mener vers l’émergence d’autres animaux adaptés à des conditions écologiques différentes que celles rencontrées sur la terre ferme.
Mais du coup, si je vous dis qu’il n’y a pas de chemin prédéterminé à l’évolution, qu’est ce qui empêche l’émergence indépendante, à un autre moment, à un autre endroit, d’espèces de vertébrés non tétrapodes mais adaptées cependant à la vie terrestre ?
Réponse : rien. Rien n’empêche l’évolution d’arriver à ce même résultat via un chemin différent. Et d’ailleurs vous savez quoi ? Ces vertébrés non tétrapodes qui gambadent sur la terre ferme, et bien ils existent ! Et vous savez comment on appelle ce phénomène d’émergence d’espèces partageant des critères morphologiques qui n’ont pas été hérités par un même chemin évolutif ?
La CONVERGENCE ÉVOLUTIVE pardi ! (Ouais, je sais pas trop pourquoi je me mets à crier en fait…)
Faisons donc un petit panel des vertébrés adaptés à la vie terrestre (alias, je respire le bon air frais et je gambade hors de l’eau) par ordre des plus connus.
D’abord, il y a les tétrapodes, représenté ci dessus par la reconstitution d’un des plus anciens tétrapodes, Ichthyostega. Les tétrapodes sont des vertébrés qui ont généralement deux paires de membres (mais pas toujours, exemple 1 et 2) et qui respirent avec des poumons (mais pas toujours – quand je vous dis que l’évolution va dans n’importe quel sens…).
Il y a aussi les proches cousins des tétrapodes, les dipneustes, qui possèdent une belle tronche de poiscaille mais qui pourtant possèdent, en plus de leurs branchies, un joli petit poumon qui lui permet de respirer à l’air libre. Par contre, s’il gambade avec ses grosses nageoires charnues, c’est uniquement sous l’eau et dans la vase.
Mais bon, le cas du Dipneuste n’est pas vraiment un cas de convergence évolutive puisque les tétrapodes ont hérité de poumons et de membres homologues à ceux trouvés chez les dipneustes. Voyons voir ce qui se passe du côté des poissons qui sont adaptés à respirer hors de l’eau, mais sans poumons! (et on ne compte donc pas les poissons qui font un court séjour hors de l’eau, mais sans respirer, comme les grunions lors de la parade amoureuse)
Commençons d’abord par les blennies, comme le curieux bonhomme ci dessus, Alticus saliens, qui peut parfaitement respirer hors de l’eau, et y passe le plus clair de son temps pour échapper à ses prédateurs et attraper de belles proies. Par contre, niveau locomotion, notre ami Alticus a choisi le saut en hauteur plutôt que la bête marche à nageoire… Encore une fois, les voies de l’évolution sont imprévisibles…
Il y a même certains poissons qui ont perdu totalement la capacité de respirer sous l’eau à force de faire les malins et de rester près de la surface. C’est par exemple le cas de l’anguille électrique dont Vran nous avait parlé il y a quelque temps, dans le cadre d’un autre cas de convergence évolutive. Les anguilles électriques doivent donc prendre une goulée d’air à la surface toutes les 10 minutes…
Dans le genre plus flippant, il y a les Channas comme Channa argus, des poissons carnivores dont la prolifération (et le fait qu’ils respirent et se promènent sur terre) en font une espèce invasive à surveiller. Ils appartiennent à un groupe cousin de toute une famille de poissons, les Anabantidés, qui utilisent un organe spécial situé dans la tête et appelé le labyrinthe pour respirer l’air de la surface et ainsi compenser le manque d’oxygène des eaux dans lesquelles ils vivent.
Version plus gentil, il y a les gouramis anabas qui peuvent respirer et marcher hors de l’eau pendant près de 8 heures :
Cliquer ici pour voir la vidéo.
Et bon, j’ai laissé le meilleur pour la fin avec le cas merveilleux des poissons grenouille (Les poissons-grenouilles avaient déjà pointé le bout de la nageoire sur SSAFT, dans un commentaire illustré). Cette fois-ci la respiration de ces étranges poissons est assurée par la peau, à l’instar des amphibiens !
Voici donc un peu plus de détails sur les défis quotidiens que doivent relever mes poissons amphibie-préférés, les poissons grenouilles ou Oxudercinae, narrés par le naturaliste qu’on ne présente plus, Sir David Attenborough. Dans la vidéo ci-dessous, vous découvrirez deux espèces de poissons amphibie, Boleophthalmus pectinirostris et Periophthalmus modestus dont le train de vie vous laissera pantois !
Cliquer ici pour voir la vidéo.
Transcription:
Un poisson grenouille (Mudskipper – sauteur de vase), un poisson qui passe la plupart de sa vie hors de la mer. Il peut marcher sur la terre et respirer à l’air libre. Sa vie est très différente de la vie de la plupart des autres poissons. Un poisson hors de l’eau, certes, mais ils prospèrent ici au Japon.
Qu’est ce qui a rendu ce changement d’habitat avantageux ? La réponse se trouve dans la boue. Lorsque la marée se retire, elle laisse un dépôt vaseux. La lumière du soleil frappe le limon fertile et des petits animaux et plantes se développent. Une source de nourriture pour le poisson-grenouille.
Mais la vie sur la terre ferme n’est pas dénuée de problèmes. Trouver un partenaire sexuelle est une tâche ardue ! Sauter haut par dessus la vase permet de se faire remarquer. Avec des yeux perchés sur le dessus de leur tête, les poissons grenouilles gardent un œil vigilant pour débusquer leurs amis ou leurs ennemis. Et le mâles combattent ceux qui s’introduisent sur leur territoire. Ils doivent aussi prendre garde à ne pas se dessécher sous le soleil. Rouler dans la vase permet de garder la peau au frais et humide.
Pour cette espèce plus petite, une meilleure alternative est de se retirer sous le sol. Il se creuse donc un tunnel dans la boue. Ces amas de déblais permettent d’appréhender l’étendue de ses excavations. À cause des marées qui inondent le tunnel deux fois par jour, la maintenance est un véritable calvaire.
Le tunnel est plus qu’un simple refuge contre le soleil. Il sert un autre but très important. Le tunnel prend en fait la forme d’un U et le bout du tunnel correspond à une chambre close dont les murs sont bordés d’œufs. Les œufs sont gardés à l’air libre du fait que l’air est plus riche en oxygène que l’eau. Le problème c’est que l’air qui est piégé dans la chambre ne durera pas longtemps. Donc le mâle va nager jusqu’à l’autre extrémité du tunnel pour prendre une gorgée d’air frais. Il repart ensuite à travers le tunnel et relâche sa gorgée dans la chambre-couveuse, réapprovisionnant d’oxygène l’atmosphère de la chambre pour que les œufs survivent. Il répètera la procédure des centaines de fois jusqu’à ce que ses œufs éclosent. Ce style de vie est très contraignant mais le poisson grenouille semble avoir trouvé un moyen de contourner tous les problèmes.
Références:
A Locomotor Innovation Enables Water-Land Transition in a Marine Fish.” By Shi-Tong Tonia Hsieh. Public Library of Science ONE, Vol. 5 No. 6, June 18, 2010.
Larson H.K., Jaafar Z. and Lim K.K.P., 2008 – An annotated checklist of the gobioid fishes of Singapore – The Raffles Bulletin of Zoology, 56(1): 135–155.
Liens:
BBC Life et la scène des Mudskippers en détail
Images FlickR CC by-sa-nc : lamont_cranston, Wikimedia Commons CC-by-sa M. Garde, Nobu Tamura, Steven G. Johnson, FlickR CC-ny-nd-sa meckert75 et Domaine public (USGS)
>> Article initialement publié sur SSAFT
Retrouvez notre dossier Évolution :
L’image de Une de Loguy en CC pour OWNI
Ou encore le chemin évolutif linéaire qui débouche sur l’humain :
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Pas étonnant ensuite que quelques confusions s’installent, mises en dérision dans cet épisode de South Park :
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Et oui, si on imagine que l’évolution a un sens et gravis une échelle du progrès, échelon par échelon, dont nous serions l’apogée, on se retrouve à douter sérieusement de sa validité. C’est ce genre de représentation de l’évolution qui mène beaucoup de personnes à se poser des questions du genre : si l’évolution tend vers l’humain, comment se fait-il qu’il existe encore des espèces moins évoluées ?
Heureusement, scientifiques et bloggeurs (comme Marion Sabourdy ou Mr Ocean Electrique) se mettent de plus en plus à traiter de la question pour chasser des esprits ces idées fausses.
Je répète ce qui a déjà été dit dans leurs billets : l’évolution ne se dirige pas dans un sens particulier. Il n’y a pas de progrès préconçu dans l’évolution. L’évolution va dans toutes les directions, contrainte uniquement par les changements génétiques aléatoires qui sont transmis au cours de la reproduction des organismes, ainsi que par la sélection naturelle qui élimine les individus non adaptés aux conditions de survie et de reproduction dans un contexte donné. Au grès de ces contraintes, les espèces vont évoluer et peuvent changer drastiquement de morphologie, de stratégie de survie, de degré de complexité, dans tous les sens possibles !
C’est à mon tour de m’atteler donc à la démystification de la représentation linéaire de l’évolution, mais on va faire ça SSAFT style, avec une jolie convergence évolutive !
Parlons donc de la transition des vertébrés aquatiques vers des vertébrés terrestres. Selon le schéma horrible ci-dessus, cette transition ne se serait effectué qu’une fois, de poisson à tétrapode, pour que le chemin de la perfection mène vers notre bonne bouille d’Homo sapiens. Si vous avez bien suivi, vous avez maintenant compris que, puisque l’évolution ne favorise pas un sens particulier, cette transition n’est qu’un chemin parmi d’autres qui dans ce cas précis, a mené à l’émergence des animaux tétrapodes, mais qui dans un autre a pu mener vers l’émergence d’autres animaux adaptés à des conditions écologiques différentes que celles rencontrées sur la terre ferme.
Mais du coup, si je vous dis qu’il n’y a pas de chemin prédéterminé à l’évolution, qu’est ce qui empêche l’émergence indépendante, à un autre moment, à un autre endroit, d’espèces de vertébrés non tétrapodes mais adaptées cependant à la vie terrestre ?
Réponse : rien. Rien n’empêche l’évolution d’arriver à ce même résultat via un chemin différent. Et d’ailleurs vous savez quoi ? Ces vertébrés non tétrapodes qui gambadent sur la terre ferme, et bien ils existent ! Et vous savez comment on appelle ce phénomène d’émergence d’espèces partageant des critères morphologiques qui n’ont pas été hérités par un même chemin évolutif ?
La CONVERGENCE ÉVOLUTIVE pardi ! (Ouais, je sais pas trop pourquoi je me mets à crier en fait…)
Faisons donc un petit panel des vertébrés adaptés à la vie terrestre (alias, je respire le bon air frais et je gambade hors de l’eau) par ordre des plus connus.
D’abord, il y a les tétrapodes, représenté ci dessus par la reconstitution d’un des plus anciens tétrapodes, Ichthyostega. Les tétrapodes sont des vertébrés qui ont généralement deux paires de membres (mais pas toujours, exemple 1 et 2) et qui respirent avec des poumons (mais pas toujours – quand je vous dis que l’évolution va dans n’importe quel sens…).
Il y a aussi les proches cousins des tétrapodes, les dipneustes, qui possèdent une belle tronche de poiscaille mais qui pourtant possèdent, en plus de leurs branchies, un joli petit poumon qui lui permet de respirer à l’air libre. Par contre, s’il gambade avec ses grosses nageoires charnues, c’est uniquement sous l’eau et dans la vase.
Mais bon, le cas du Dipneuste n’est pas vraiment un cas de convergence évolutive puisque les tétrapodes ont hérité de poumons et de membres homologues à ceux trouvés chez les dipneustes. Voyons voir ce qui se passe du côté des poissons qui sont adaptés à respirer hors de l’eau, mais sans poumons! (et on ne compte donc pas les poissons qui font un court séjour hors de l’eau, mais sans respirer, comme les grunions lors de la parade amoureuse)
Commençons d’abord par les blennies, comme le curieux bonhomme ci dessus, Alticus saliens, qui peut parfaitement respirer hors de l’eau, et y passe le plus clair de son temps pour échapper à ses prédateurs et attraper de belles proies. Par contre, niveau locomotion, notre ami Alticus a choisi le saut en hauteur plutôt que la bête marche à nageoire… Encore une fois, les voies de l’évolution sont imprévisibles…
Il y a même certains poissons qui ont perdu totalement la capacité de respirer sous l’eau à force de faire les malins et de rester près de la surface. C’est par exemple le cas de l’anguille électrique dont Vran nous avait parlé il y a quelque temps, dans le cadre d’un autre cas de convergence évolutive. Les anguilles électriques doivent donc prendre une goulée d’air à la surface toutes les 10 minutes…
Dans le genre plus flippant, il y a les Channas comme Channa argus, des poissons carnivores dont la prolifération (et le fait qu’ils respirent et se promènent sur terre) en font une espèce invasive à surveiller. Ils appartiennent à un groupe cousin de toute une famille de poissons, les Anabantidés, qui utilisent un organe spécial situé dans la tête et appelé le labyrinthe pour respirer l’air de la surface et ainsi compenser le manque d’oxygène des eaux dans lesquelles ils vivent.
Version plus gentil, il y a les gouramis anabas qui peuvent respirer et marcher hors de l’eau pendant près de 8 heures :
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Et bon, j’ai laissé le meilleur pour la fin avec le cas merveilleux des poissons grenouille (Les poissons-grenouilles avaient déjà pointé le bout de la nageoire sur SSAFT, dans un commentaire illustré). Cette fois-ci la respiration de ces étranges poissons est assurée par la peau, à l’instar des amphibiens !
Voici donc un peu plus de détails sur les défis quotidiens que doivent relever mes poissons amphibie-préférés, les poissons grenouilles ou Oxudercinae, narrés par le naturaliste qu’on ne présente plus, Sir David Attenborough. Dans la vidéo ci-dessous, vous découvrirez deux espèces de poissons amphibie, Boleophthalmus pectinirostris et Periophthalmus modestus dont le train de vie vous laissera pantois !
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Transcription:
Un poisson grenouille (Mudskipper – sauteur de vase), un poisson qui passe la plupart de sa vie hors de la mer. Il peut marcher sur la terre et respirer à l’air libre. Sa vie est très différente de la vie de la plupart des autres poissons. Un poisson hors de l’eau, certes, mais ils prospèrent ici au Japon.
Qu’est ce qui a rendu ce changement d’habitat avantageux ? La réponse se trouve dans la boue. Lorsque la marée se retire, elle laisse un dépôt vaseux. La lumière du soleil frappe le limon fertile et des petits animaux et plantes se développent. Une source de nourriture pour le poisson-grenouille.
Mais la vie sur la terre ferme n’est pas dénuée de problèmes. Trouver un partenaire sexuelle est une tâche ardue ! Sauter haut par dessus la vase permet de se faire remarquer. Avec des yeux perchés sur le dessus de leur tête, les poissons grenouilles gardent un œil vigilant pour débusquer leurs amis ou leurs ennemis. Et le mâles combattent ceux qui s’introduisent sur leur territoire. Ils doivent aussi prendre garde à ne pas se dessécher sous le soleil. Rouler dans la vase permet de garder la peau au frais et humide.
Pour cette espèce plus petite, une meilleure alternative est de se retirer sous le sol. Il se creuse donc un tunnel dans la boue. Ces amas de déblais permettent d’appréhender l’étendue de ses excavations. À cause des marées qui inondent le tunnel deux fois par jour, la maintenance est un véritable calvaire.
Le tunnel est plus qu’un simple refuge contre le soleil. Il sert un autre but très important. Le tunnel prend en fait la forme d’un U et le bout du tunnel correspond à une chambre close dont les murs sont bordés d’œufs. Les œufs sont gardés à l’air libre du fait que l’air est plus riche en oxygène que l’eau. Le problème c’est que l’air qui est piégé dans la chambre ne durera pas longtemps. Donc le mâle va nager jusqu’à l’autre extrémité du tunnel pour prendre une gorgée d’air frais. Il repart ensuite à travers le tunnel et relâche sa gorgée dans la chambre-couveuse, réapprovisionnant d’oxygène l’atmosphère de la chambre pour que les œufs survivent. Il répètera la procédure des centaines de fois jusqu’à ce que ses œufs éclosent. Ce style de vie est très contraignant mais le poisson grenouille semble avoir trouvé un moyen de contourner tous les problèmes.
Références:
A Locomotor Innovation Enables Water-Land Transition in a Marine Fish.” By Shi-Tong Tonia Hsieh. Public Library of Science ONE, Vol. 5 No. 6, June 18, 2010.
Larson H.K., Jaafar Z. and Lim K.K.P., 2008 – An annotated checklist of the gobioid fishes of Singapore – The Raffles Bulletin of Zoology, 56(1): 135–155.
Liens:
BBC Life et la scène des Mudskippers en détail
Images FlickR CC by-sa-nc : lamont_cranston, Wikimedia Commons CC-by-sa M. Garde, Nobu Tamura, Steven G. Johnson, FlickR CC-ny-nd-sa meckert75 et Domaine public (USGS)
>> Article initialement publié sur SSAFT
]]>Le WRI est un think tank environnemental qui va au delà de la recherche pour trouver des moyens pratiques pour protéger la planète et améliorer la vie des peuples.
C’est très noble.
Mais une autre manière de voir, s’y l’on croit les journalistes Agnès Bertrand et Françoise Degert, est celle qui va suivre. Après avoir écouté leur entretien dans l’émission Terre à terre du 16 Octobre, voici à la fois ce que j’en ai compris et comment je l’interprète.
World Resources Institute est une organisation de lobbying et d’influence, contrôlée par des grandes firmes (banques d’affaires, agro-alimentaire, chimie, extraction de matière première, etc.) qui vise à la fois le détournement de la « Convention pour la Biodiversité » et l’appropriation des ressources naturelles et de la biodiversité.
Le détournement de la Convention pour la Biodiversité, adopté lors du Sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992 (texte PDF de la convention en français), était la première motivation. En effet, cette convention prônait notamment la fin des subventions (à l’horizon 2020) pour toute activité qui nuirait à la biodiversité. Pétroliers, industries de l’agro-alimententaire et de l’extraction minière et autres ont bien compris que si cette convention venait à être appliquée, leur profit risquait de fondre comme neige au soleil. C’est comme si chaque industriel devait être tenu comptablement et financièrement responsable des externalités négatives qu’il produit : ce qui n’est pas acceptable. Il fallait donc détourner la convention.
Détournement qui se fait en trois moments :
Entre la Convention sur la Biodiversité de 1992 et le sommet de Nagoya de 2010, le système financier a transformé une menace en une gigantesque opportunité. Nous sommes passés d’une hégémonie menacée à une hégémonie triomphante et sans vergogne.
Leur crédo, très classiquement libéral, est que le meilleur moyen de préserver les ressources naturelles ainsi que la biodiversité est de confier tout cela au marché. Dit autrement, il faut que la biodiversité ait une valeur marchande pour qu’elle puisse devenir objet d’intérêt et donc être protégée. L’argument qui justifie la démarche étant que : la meilleure façon d’échapper aux effets toxiques de la spéculation financière des marchés est encore … de rentrer dans le marché. La meilleure façon d’être à l’abri des effets et du fonctionnement d’un système étant de s’y fondre.
Cependant la voie du marché n’est empruntable que par des propriétaires, ceux qui possèdent un titre de propriété. Pour entrer dans le marché, et être « protégé mécaniquement » des effets du marché, il faut donc que la biodiversité trouve un propriétaire.
Mais d’abord il va falloir inventorier et classifier la biodiversité. Puisque l’on souhaite mettre quelque chose sur le marché, il faut être en mesure de le caractériser et de lui donner une valeur. Comment va-t-on pouvoir classer et répertorier toute la biodiversité afin de pouvoir la présenter au marché en tant que marchandise ? Prendre la question au niveau de la molécule serait beaucoup trop long et complexe, un classement en matière de « service rendu » sera préféré. Après tout, à quoi çà sert la biodiversité ? Quels services cela rend-il ?
Si c’est un service, cela a nécessairement une valeur. C’est d’ailleurs presque une tautologie tant c’est l’établissement d’une valeur qui justifie un service.
Service => Valeur puis Service = Valeur
Un jour, tous les services rendus par la nature auront une valeur marchande ; l’air que l’on respire, la graine que l’on plante, la terre que l’on cultive, l’eau que l’on boit, la pharmacie naturelle des plantes, les molécules produites naturellement, etc. C’est une histoire de fournisseur : fournisseurs d’énergie qui deviennent fournisseurs de nature et de biodiversité. Au sens strict, les fournisseurs sont ceux qui mettent au four, qui enfournent ce qui va être consumé et consommé.
On va donc faire comme ça : on va dire que la biodiversité produit des services. Au début on parlera de la biodiversité, puis après d’écosystèmes et à l’arrivée de « services écosystémiques » !
Ne reste plus au WRI qu’à faire pression sur l’ONU pour financer un programme sur l’environnement sensé faire une classification des écosystèmes (pour mieux protéger la biodiversité bien sûr). Le projet devant produire le rapport « Millenium Ecosystem Assessment ». Un « assessment » de la biodiversité qui va identifier et classer 31 services écosystémique regroupés en quatre catégories :
On assiste à la création d’un marché, celui de la biodiversité, de la diversité de la vie. Y compris jusqu’aux savoir-faire compris comme « services culturels ».
Pour qu’un service soit sur le marché, il faut qu’il puisse avoir des équivalences avec d’autres services et d’autres marchandises. Cette activité existe, c’est le métier des banques de compensation (Clearstream par exemple, est une banque de compensation). Il faut pouvoir dire que tel territoire a telle valeur et peut s’échanger contre d’autres services. De la sorte, les aires protégées deviennent des actifs financiers.
C’est ce qui s’est passé quand le Brésil a épongé une dette de 61 M$ avec les USA en vendant une aire protégée, la Mata Atlantica (la forêt atlantique du Brésil). Cette zone va donc être géré par les USA. Grâce à cet actif, les USA pourront se dédouaner plus facilement de leur impact écologique et pourront influer sur le marché du Carbone. L’achat de la gestion d’une aire protégée va donner des passe-droits, des joker qui vont sécuriser les profits d’une industrie de guerre. Il s’agit de pouvoir acheter des bonus pour ne pas subir les conséquences des malus, s’acheter une bonne conduite.
Mais pas seulement. La compensation, en faisant entrer la biodiversité dans le marché et dans des transactions financières, étend radicalement l’« aire de jeu » des pratiques spéculatives à tout le vivant. C’est un nouveau marché, un nouveau golden field (un champ d’opportunité en or).
Pour être sur un marché, il faut donc qu’il y ait compensation. Le Littré nous indique que compenser désigne l’acte de déclarer équivalente la valeur de deux choses puis, par extension, la compensation est ce qui intervient dans le dédommagement d’un préjudice ou d’un désavantage (on réclame une compensation pour préjudice subi). Enfin, un troisième sens sous la forme d’un verbe réfléchi : « se compenser », au sens où des erreurs qui se compensent n’affectent pas le résultat.
Avec ce dernier sens, on ne déclenche pas de transaction pour les opérations qui s’annulent entre elles sans affecter le résultat. Cette pratique à le nom de « novation », elle désigne le fait, toujours selon le littré, « d’éteindre une ancienne obligation en changeant le titre, le créancier ou le débiteur « , c’est ce que font les chambres de compensation en se substituant successivement aux créanciers, ou débiteurs, lors d’une opération de gré-à-gré.
Les pays fortement endetté pourraient ainsi éponger leur dette grâce à des compensation en biodiversité. Un visage de l’industrie capitaliste, celui qui détruit la biodiversité, se propose maintenant d’effacer l’ardoise en récupérant en plus le peu qu’il en reste. « Je possède ce que je détruit », la boucle est bouclée. Ainsi un parlementaire allemand, du parti de Mme Merkel, a-t-il suggéré qu’en retour de son aide financière à la Grèce, celle-ci devrait céder en compensation ses îles à l’Allemagne !
Les actifs de ces banques de compensation passent ensuite dans des chambres de compensation qui sont totalement opaques et occultes dans leur mode de fonctionnement. L’opacité de ces activités a ainsi fait dire que ces banques avaient une activité de blanchiment d’argent sale qui permet également de faire marcher la planche à billet.
Ce qui donc a été présenté à Nagoya, du 23 au 30 Octobre 2010, c’est le fruit d’un travail qui a été confié à un banquier de la Deutsche Bank, basé à Bombay. Il s’agit de « The economy of ecosystems and biodiversity » (TEEB). Avant même d’être présenté à Nagoya, des extraits et un pré-rapport ont été présenté à Londres le 13 Juillet 2010 sous l’intitulé « The economy of ecosystems and biodiversity for Business ».
La prochaine étape est la mise en place de l’IPBES (Plateforme intergouvernementale, scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques). Présentée comme le « GIEC de la biodiversité », l’IPBES est beaucoup plus qu’un groupe d’experts scientifiques puisque il a des prérogatives politiques avec un droit de gestion de toute la biodiversité sans forcément directement passer par les états, c’est à dire en pouvant dialoguer directement avec les collectivités locales et les populations autochtones.
Tout est donc en place pour un arrimage de la biodiversité à la finance : les aspects juridiques et la répartition des tâches sont en train d’être finalisés, et on peut être certain que l’IPBES va court-circuiter la mise en place des mesures préconisées par la Convention sur la biodiversité, au premier rand duquel les subventions aux activités produisant des externalités négatives sur la biodiversité.
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Article initialement publié sur le blog de Christian Fauré sous le titre : « Biodiversity (for Business) »
>> photos flickr CC Stéfan ; Rodrigo Soldon ; Michael Grimes
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