OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Sarkozy ravale son steak halal http://owni.fr/2012/03/06/sarkozy-le-pen-halal/ http://owni.fr/2012/03/06/sarkozy-le-pen-halal/#comments Tue, 06 Mar 2012 11:13:08 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=100900

Depuis lundi 5 mars et les déclarations de Nicolas Sarkozy sur la viande halal, “premier sujet de préoccupation des Français”, lors d’un déplacement à Saint Quentin, confrères et politiques s’agitent autour d’une déclaration non seulement tronquée mais fausse, même dans sa version intégrale.

Le candidat UMP n’est que très récemment rentré dans la polémique lancée par Marine Le Pen sur l’abattage rituel. Depuis son passage le 21 février dans la matinale de France inter, la présidente du Front national a fait de la viande halal un cheval de bataille de sa campagne.
Pour justifier son engagement sur ce terrain houleux, Nicolas Sarkozy, devant un buisson de micros de radios et de télévisions, a déclaré – comme on peut le voir sur les images récupérées par la chaîne i>TELE :

Un sondage il y a dix jours disait : le premier sujet de préoccupation, de discussion des Français, je parle sous votre contrôle, c’est cette question de la viande halal.

Ce n’est donc pas sur sa propre opinion mais sur un sondage que s’appuie Nicolas Sarkozy pour affirmer que l’abattage rituel est le débat phare des Français. Cependant, sous le “contrôle” des journalistes, sa référence apparaît très contestable.

Inquiétudes

Il y a un peu plus de dix jours, le 20 février, le Baromètre TNS des préoccupations des Français s’est effectivement penché pour La Croix sur les questions qui taraudent les électeurs.

Or, sans grande surprise, c’est le duo “chômage et emploi”, qui domine les inquiétudes des personnes interrogées, comme ce fut le cas depuis la première édition de cette étude – à l’exception de juin 2008 où le pouvoir d’achat avait prix la tête des inquiétudes, voir le schéma ci-dessous. Le seul sujet qui se rapproche vaguement de la “viande halal” (sans pour autant s’identifier à ce débat), à savoir “La sécurité alimentaire et la qualité de la nourriture” arrive en douzième position, cité par 23% des sondés et seulement par 1% d’entre eux comme premier sujet de préoccupation.

Si ce thème connaît une augmentation de ses évocations de 7 points par rapport à janvier, sa progression n’égale pas celle de sujets comme la santé (+8), l’intégration (+13). Ou bien un sujet encore jamais abordé par Nicolas Sarkozy dans ses déclarations vérifiées par le Véritomètre : le logement (+16), qui se range en sixième position des sujets évoqués. Quatre rangs devant le sujet qui, selon le candidat de l’UMP, hanterait les jours et les nuits de ses compatriotes.


Photographie par Eduardo Amorim (CC-byncsa)

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Data diététique : bonjour veaux, vaches, cochons, couvées ! http://owni.fr/2011/05/15/sacrifices-de-poulets/ http://owni.fr/2011/05/15/sacrifices-de-poulets/#comments Sun, 15 May 2011 11:30:22 +0000 Guillaume Ledit http://owni.fr/?p=62724 Billet initialement publié sur le datablog d’OWNI.

Le britannique Nigel Holmes réalise des infographies depuis 1977. Il a notamment travaillé pour Time Magazine pendant près de quinze ans et collabore aujourd’hui pour The New-Yorker, The Atlantic, Life, Wired ou encore National Geographic. C’est sur le site de ce magazine qu’a paru sa dernière production, intitulée Food For thought, qui représente le nombre d’animaux tués en 2009 pour satisfaire aux besoins d’une population mondiale croissante. Du million et demi de chameaux aux 52 milliards de poulets, les statistiques de la FAO sont instructives.

Pour votre plus grand plaisir, la traduction du texte de présentation:

Il y aura bientôt 7 milliards d’êtres humains dans le monde, mais comment comparer ce nombre aux autres espèces de la planète? Les fourmis sont évidemment plus nombreuses que nous. Edward O. Wilson, biologiste à Harvard et spécialiste des fourmis, estime qu’elles sont entre 1000 trillions et 10 000 trillions à tout moment. Cela fait un million de fourmis pour chacun d’entre nous. N’est-ce pas l’effet que ça fait quand elles envahissent nos cuisine? Estimer le nombre d’animaux, particulièrement ceux qui vient à l’état sauvage, est compliqué. On peut en revanche représenter une catégorie d’animaux que nous pouvons compter: ceux que nous mangeons.

Infographie dénichée grâce à Karen Bastien, et à son Storify de veille infographique <3

Photo FlickR CC Hey Paul.

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Free Cultures: des levures au service des Indonésiens http://owni.fr/2011/04/03/free-cultures-des-levures-au-service-des-indonesiens/ http://owni.fr/2011/04/03/free-cultures-des-levures-au-service-des-indonesiens/#comments Sun, 03 Apr 2011 14:00:37 +0000 Stéphanie Vidal http://owni.fr/?p=54908 À l’occasion de la présentation d’Intelligent Bacteria:Saccharomyces Cerevisiae à la Gaité Lyrique dans le cadre du festival Mal au Pixel qui aura lieu du 9 au 19 juin à Paris, nous vous proposons de relire l’histoire de cet alcool do-it-yourself. Nichée sous les toits du bâtiment, l’installation nous fait entendre une douce mélodie organique, au rythme des gouttes d’eau tombant dans les verres d’éthanol.


L’art et la matière

transmediale. [en] Un festival berlinois sans majuscule mais pas sans superbe. Chaque année, pendant une petite semaine, la capitale allemande et sa Maison de la Culture deviennent le lieu privilégié des arts et des cultures digitales. Créé en 1988 comme une sorte de Salon des Refusés de Berlinale [de, en] – un festival local de cinéma – transmediale s’est imposé depuis comme un lieu alternatif où l’on peut voir ce qui n’a pas toujours sa place ailleurs.

Avec pour thème « Response : Ability », l’édition 2011 réunissait des artistes et des collectifs se demandant comment la technologie et les valeurs qu’elle véhicule affectent voire modifient nos corps physiques et sociaux.

L’espace d’une semaine, le digital et l’organique s’articulent autour de cellules de réflexion et d’installations à partir d’ADN ou de processus chimique, à l’instar de « Intelligent Bacteria – Saccharomyces cerevisiae », une œuvre du collectif indonésien House of Natural Fiber (HONF) [en] qui exposent des jus de fruit en pleine fermentation. Désignés vainqueurs du prix prestigieux décerné par le festival, les organisateurs ont avant tout récompensé leur action dans l’archipel. En valorisant les pratiques « Do It Yourself » et utilisant les technologies open source, HONF tente de répondre à une contradiction culturelle par… la culture et l’emploi de levures.

Par le biais d’expositions et d’ateliers, ce collectif donne à la population les connaissances et les pratiques adéquates pour réaliser le processus de fermentation alcoolique dans les meilleures conditions. Parfois activité hors-la-loi, souvent alternative économique, et toujours nécessité sanitaire, produire et boire du bon vin est aujourd’hui en Indonésie un enjeu et un défi pour la société.

Boire : la roulette indonésienne

The House Of Natural Fiber est une plateforme née de la collaboration d’artistes « new media » et de scientifiques indonésiens spécialisés en microbiologie et en biotechnologie. Créée en 1999 à Yogyakarta – ville universitaire, centre de la culture javanaise et de la pensée musulmane – comme un laboratoire rempli de pipettes, d’idées et de bonnes volontés, HONF se donne pour objectif de mettre au quotidien la technologie au service de la société.

« Pour le projet Intelligent Bacteria, nous avons décidé d’utiliser l’art comme moyen de médiation et de médiatisation. Nous avons d’abord réalisé une exposition itinérante en Indonésie afin de rendre un peu plus attractif notre projet auprès des locaux que nous voulons sensibiliser et éduquer… Être présent à transmediale est aussi une manière de faire connaître la situation indonésienne à l’international », explique Irfan D. Prijambada, président du Laboratoire d’agriculture microbiologique à l’université Gadjah Mada de Yogyakarta, membre du collectif The House of Natural Fiber.

Avec ses grandes bonbonnes dans lesquelles fermentent des jus de fruit, l’installation acoustique, « Intelligent Bacteria – Saccharomyces cerevisiae » semble n’être qu’un prétexte, une opportunité de figer dans le temps et dans l’espace un projet dont les dimensions dépassent largement celle de la galerie qui la contienne.

C’est à la lecture du cartel que l’ampleur du projet se révèle : par le biais de cette installation les membres de HONF ambitionnent d’attirer l’attention sur un problème qui affecte mortellement la société indonésienne. En consommant sans le savoir de l’alcool frelaté, nombre de leurs concitoyens trouvent – bêtement selon leurs termes – la mort en lieu et place de l’ivresse.

Aujourd’hui, plusieurs raisons poussent les Indonésiens à se procurer des breuvages alcoolisés sur le marché noir et à risquer leur vie ou leur vision. Car toutes les bouteilles ne sont pas bonnes à boire ! Certaines d’entre elles contiennent du méthanol. Cette substance hautement toxique qui n’est pas  décelable au goût ou à l’odeur affecte le système nerveux central de ceux qui en ingèrent, entraînant la cécité voire la mort dans les pires cas. Or, sans une spectrométrie, il n’est pas possible de savoir si les boissons sont contaminées.

L’alcool : une contradiction culturelle

Bien que le pays soit fort d’une longue et riche tradition de fermentation alcoolique, la consommation d’alcool est devenue, au fil du temps, une véritable contradiction culturelle.

L’Indonésie compte environ 238 millions d’habitants et plus de 80 % d’entre eux sont de confession musulmane. Le pourcentage place ce pays laïc en tête sur la liste des pays à majorité musulmane pour le nombre d’habitants. Pourtant, les réglementations d’influence religieuse rendent de plus en plus difficile la consommation et la production de breuvages alcoolisés dans certaines parties du pays.

Bien que les partis religieux aient tenté, sans y parvenir, de faire voter une constitution islamique – qui aurait abouti à l’interdiction de la consommation d’alcool à l’échelle nationale en 1999 – les réglementations divergent dans l’archipel. En fonction de l’endroit où l’on se trouve, la consommation d’alcool peut-être tout à fait tolérée, soumise à conditions (boire chez soi par exemple) ou strictement interdite.

Après la chute de Soeharto en 1998, les structures politiques et gouvernementales ont été largement réformées et le pouvoir décentralisé au profit des régences – villes et régions. Libres d’établir leurs propres règlementations, nombre d’entre elles ont voté des perda, des règlements locaux inspirés de la charia. Ainsi, des villes à forte tradition islamique comme Gresik (Java), Tangerang (Ouest Jakarta) ou Bulukunba (Sulawesi du Sud) et les provinces de Kalmento (Borneo) et d’Aceh (Nord Sumatra) ont promulgué entre 2000 et 2005 des perda interdisant totalement la consommation et la distribution d’alcool sur leur territoire.

Mais contrairement à ce que l’on pourrait croire ces lois d’inspiration islamiques ne sont pas uniquement le fait de dirigeants islamistes, comme nous l’apprend Andrée Feillard, chargée de recherche au CNRS spécialiste de l’Indonésie et de l’islam traditionaliste en Asie. Il arrive que certains politiciens laïcs, en quête de voix pour de  prochaines élections, n’hésitent pas à les soumettre au vote d’une population souhaitant plus de morale publique dans un pays vicié par la corruption.

La bouteille, un produit de luxe

Si la spécialiste française et le professeur indonésien s’accordent à dénoncer un durcissement des lois islamiques depuis une dizaine d’années, contraintes législatives et tabous religieux ne sont pas les seules causes poussant la population à se fournir en alcool sur un marché noir comme la mort.

« À Yogyarkarta, temoigne Irfan D. Prijambada, la consommation d’alcool dans un lieu public est passible de prison mais nous ne risquons rien si nous buvons à la maison. Ici, l’alcool est soumis à de lourdes taxes. Peu d’Indonésiens peuvent se permettre d’acheter des bouteilles à prix d’or dans les magasins et se tournent vers le marché noir. Le problème tient au fait que les producteurs amateurs ne maîtrisent pas les processus de fermentation alcoolique et ne respectent pas les conditions d’hygiène nécessaires pour faire du vin propre à la consommation. Suite à une contamination bactériologique, certaines de leurs cuvées contiennent du méthanol.»

En imposant de lourdes taxations sur l’importation et la distribution des boissons alcoolisées le gouvernement indonésien fait bondir le prix des bouteilles ; et il n’est pas rare, quand le bar est vide ou quand le portefeuille est trop léger, de voir les touristes descendre dans la rue se procurer de l’alcool local.

Jusqu’au début 2010 les boissons labellisées étaient soumises à la taxe sur les produits de luxes, infligeant aux prix une hausse de 40 à 75 %. Cette taxation a été levée, il a un maintenant un an, par la régulation du 17 mars 2010 [pdf, en] énoncée par le PMK, le ministère des Finances indonésien. Pourtant au lieu de diminuer significativement le prix des bouteilles, cette régulation le fait croître dramatiquement : en supprimant la taxe sur les produits de luxe, elle augmente le droit d’accise en fonction du degré d’éthanol qu’elles contiennent. Un droit d’accise est une taxe perçue sur la consommation d’un certain produit dans un territoire donné. En majorant ce droit sur les boissons alcoolisées, le gouvernement a marqué sa volonté de décourager les Indonésiens à consommer : dès le mois d’avril, les prix en boutique avait augmenté de 100 à 300 %.

Depuis qu’elle n’est plus considérée comme telle, la bouteille est vraiment devenue un produit de luxe. À titre d’exemple, le prix d’une bouteille de vin rouge de marque Orang Tua est passé de 15.000 à 45.000 roupies indonésiennes suite à la régulation soit environ de 1,25 à 3,75 euros. Dans un pays ou de nombreux ménages sont proches ou en-dessous du seuil de pauvreté national – approximativement 1,10 euros par jour – la mesure remplie partiellement sa fonction. Elle dissuade tout à fait la population d’acheter en magasin mais pas vraiment de lever le coude.

Ipung Nimpuno, porte-parole de l’Association des brasseurs indonésiens, le GIMMI, avait tiré le signal d’alerte en affirmant que cette régulation allait « encore accroître le marché noir » qui représentait déjà selon lui 80% de l’alcool consommé dans le pays. Les chiffres semblent malheureusement abonder dans son sens. Paradoxalement, en voulant réduire la consommation d’alcool avec des mesures fortes, le gouvernement semble avoir contribué à l’augmentation du nombre de décès liés à sa consommation.

Éthanol vs Méthanol

Il semble qu’il y a toujours eu des décès liés à la consommation d’alcool frelaté en Indonésie. Andrée Feillard se souvient de quelques cas quand elle travaillait comme journaliste à l’AFP à Jakarta dans les années 80. Mais leur nombre n’a jamais été aussi élevé qu’à l’heure actuelle. Pour les membres de HONF la corrélation est évidente : cette augmentation macabre est directement liée à celle du droit d’accise.

Ainsi, 120 Indonésiens et 3 techniciens russes auraient trouvé la mort en 2010 suite à un empoisonnement au méthanol selon les chiffres avancés par DetikFinance, un journal d’économie indonésien. Des chiffres que l’on pourrait sans trop se méprendre revoir à la hausse pour avoir une idée plus juste du nombre de victimes. Et ce pour deux raisons : d’abord cette cause de décès ne peut être confirmée que par une autopsie, ensuite il faudrait comptabiliser tous ceux qui ont perdu la vue ; pour ces derniers, Irfan D. Prijambada suggère de multiplier par deux la première approximation obtenue.

C’est donc avec des levures et non pas des bactéries que HONF tente de faire changer les choses et peut-être même d’apporter une solution à ce problème. « Nous avons employé le mot bactérie car les Indonésiens l’utilisent comme terme générique pour désigner l’ensemble des micro-organismes. Mais les saccharomyces cerevisiae sont bel et bien des levures et non pas des bactéries. Nous voulons apprendre à la population que faire du vin n’est pas une choses facile et qu’il est fondamental de respecter scrupuleusement une équation pourtant assez simple : eau minérale bouillie + fruits + sucre + levures + hygiène = vin propre à la consommation. »

Cliquer ici pour voir la vidéo.


L’empoissonnement bactériologique résulte de mauvaises conditions d’hygiène. Les levures ont besoin d’un environnement salubre pour faire leur besogne – transformer le sucre contenu dans le jus des fruits en éthanol et en dioxyde de carbone – et rester majoritaires dans la faune microbiologique.

Sylvie Dequin, directrice de recherche à l’Institut National de Recherche en Agronomie et spécialiste de la physiologie intégrative des levures ne cache pas sa surprise : « Je n’ai jamais entendu parler de ce genre de contamination bactériologique sous nos latitudes. Les bactéries incriminées telles que les salmonelles ou les staphylocoques sont celles que l’on trouve généralement dans les fosses septiques et les eaux usées. Elles se développent dans des environnements privés d’air – la fermentation est un processus s’opérant en anaérobie – et produisent du méthanol. »

Just Do It Yourself

Avec ce projet, les membres de HONF ne souhaitent pas uniquement éviter la mort d’une partie de leurs concitoyens. Ils sont aussi désireux d’améliorer les conditions de vie de toute la population. Via l’élevage des levures et la fabrication de vin, ils souhaitent contribuer à renforcer l’autonomie alimentaire des habitants en leur montrant qu’ils peuvent pourvoir à leur besoin à partir de ce que la nature met à leur disposition.

Les Indonésiens boudent ainsi le raisin, préférant piocher parmi le large spectre de fruits tropicaux (ananas, mangue, salak, guanábana, etc.) pour faire leur vin. Ils réalisent par la même occasion de sacrées économies : grâce à eux produire 5 litres de vin ne coûte que 15.000 roupies indonésiennes, soit l’ancien prix d’une bouteille de vin rouge Orang Tua de 75 centilitres.

Apprentissage de technologies abordables, lutte contre la paupérisation, capacitation des individus : HONF essaie de mettre en place un système alternatif pour pallier les difficultés de la population tout en essayant d’inclure les gouvernements dans leur démarche, les obligeant bon gré mal gré à regarder en face ce qu’ils essaient d’ignorer.

« Nous avons proposé aux régions de nous aider. Même si les régions à majorité chrétienne et bouddhiste sont évidemment plus promptes à accepter le programme, certaines régions musulmanes sont prêtes à nous suivre à certaines conditions –  que le vin soit produit pour l’industrie et non pas pour être consommé par la population locale ou qu’on leur enseigne comment faire du vinaigre plutôt que du vin – d’autres encore nous envoient tout simplement balader », conclut Irfan D. Prijambada.

Grâce à de toutes petites levures, une poignée de scientifiques et d’artistes tendent à modifier la société dans laquelle ils évoluent en donnant les moyens à ceux qui n’en ont pas vraiment de se débrouiller par eux-mêmes.

Avec Intelligent Bacteria ils espèrent que tous – les gouvernants et les quidams mais aussi la communauté internationale – comprendront l’ampleur et l’importance vitale de leur cause. Et si ce n’est pas le cas, on dirait bien qu’ils espèrent amener les Indonésiens réceptifs par des chemins de traverse suffisamment loin d’un système qui les met en difficulté pour qu’ils puissent le regarder, sans heurts, s’effondrer lentement mais sûrement sous le poids de ses propres contradictions.

Illustrations AttributionNoncommercialNo Derivative Works Anne Helmond

Les autres articles du dossier :
Mark Suppes, l’homme qui fusionne des atomes dans son garage

La prochaine révolution ? Faites-la vous même !

Image de une Marion Boucharlat. Téléchargez-là :)

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Quelques alternatives aux pesticides http://owni.fr/2011/03/17/quelques-alternatives-aux-pesticides/ http://owni.fr/2011/03/17/quelques-alternatives-aux-pesticides/#comments Thu, 17 Mar 2011 10:40:27 +0000 Gayané Adourian http://owni.fr/?p=34380 Après Le Monde selon Monsanto, Marie-Monique Robin revient en lanceuse d’alerte avec un documentaire efficace, très fouillé et bien ficelé à propos des produits chimiques que nous ingérons malgré nous. Notre poison quotidien est cette fois un réquisitoire contre les industriels de la chimie, mais la journaliste pointe aussi les dysfonctionnements au niveau du circuit d’évaluation des différents produits, avant leur autorisation d’utilisation.

Trois thèmes sont abordés dans le documentaire, partant des agriculteurs victimes de maladies et intoxications chroniques liées à l’utilisation des pesticides en passant par les additifs alimentaires pour finir par les perturbateurs endocriniens (dont le bisphénol A). Tout au long du circuit, Marie-Monique Robin se balade d’institution en institution, appuyant ses recherches avec de nombreuses interviews.

La France championne avec 88 000 tonnes sur 140 000

En Europe, la France est le premier utilisateur de pesticides avec une consommation annuelle de 88 000 tonnes sur 140 000 pulvérisées chaque année. En tout, environ 400 molécules (ou principes actifs) sont autorisées actuellement. Petite comparaison : en 1990, 1 000 substances étaient en circulation, d’après Jean-Charles Bocquet, directeur du syndicat de l’industrie des pesticides, l’UIPP. Et toute la première partie du documentaire traite des problèmes de l’utilisation massive des pesticides.

Mais en regardant Notre poison quotidien, j’ai eu l’impression que l’agriculture n’avait pas évolué depuis 1964, date à laquelle le film Le pain et le vin de l’an 2000 a été diffusé. Comme le dit très bien Marie-Monique Robin toutes les bonnes questions ont été posées dans ce film des années 60, mais la réalisatrice oublie que l’agriculture a évolué depuis, avec par exemple ce qu’on appelle aujourd’hui la chimie verte.

Car parallèlement à toute cette filière, un mouvement autour de pesticides non-toxiques est en marche, illustré par le plan Ecophyto 2018 : ce plan, mis en place suite au Grenelle de l’environnement, prévoit de réduire de moitié les quantités utilisées d’ici… 2018, « dans la mesure du possible » souligne Antoine Blanchard, ingénieur agronome.

Une autre alternative émerge avec les stimulateurs de défenses naturelles (SDN) : basés sur le même principe que celui du vaccin mais appliqué aux plantes, ils font appel à des connaissances bien établies sur l’immunité des plantes. L’idée consiste à pulvériser une substance qui met en branle les réactions de défense des plantes (souvent une substance naturelle, extraite d’une algue ou d’une bactérie), afin d’immuniser celle-ci — sans être directement toxique pour le ravageur et donc pour l’environnement et l’être humain.

Un certain nombre de produits sont déjà commercialisés en France, en Europe et aux États-Unis et les efforts politiques et économiques vont dans ce sens. Mais Antoine Blanchard indique que leur usage ne se diffuse pas, pour plusieurs raisons. Il souligne :

Ils forment un nouveau paradigme, une nouvelle façon de penser la lutte phytosanitaire qui est compliquée à imposer ; ils sont délicats à manier et ont une efficacité plus variable (selon les tests en vigueur).

De plus, ils sont souvent aux mains des grosses firmes de l’industrie phytosanitaire, qui ne sont pas incitées à les mettre en avant. Jean-Charles Bocquet de l’UIPP confirme :

Les SDN sont moins efficaces que les produits chimiques actuellement utilisés, compliqués à mettre au point et posent quelques problèmes au niveau de leur stabilité.

Pourtant, dans ces pesticides de synthèse, chaque paramètre scientifique – efficacité in vivo et in vitro, métabolisme et devenir in vivo, toxicologie, écotoxicologie… – est connu le plus précisément possible, ce qui n’est pas négligeable. Les SDN sont donc un objet encore à l’étude dont les recherches doivent être favorisées.

D’autres alternatives qui sont purement biologiques aux pesticides existent aussi. Celles-ci ont en leur faveur d’être portées par des PME et donc délaissées par les grands groupes, notamment en raison de l’importance des savoir-faire (non brevetables) dans le secteur du biologique. Curieusement (ou pas) Marie-Monique Robin, n’en parle pas du tout dans son film. Elle prône par contre avec force le retour à l’agriculture biologique.

Illustrations FlickR CC : arbeer.de, Leonard John Matthews

Retrouvez notre dossier sur l’enquête de Marie-Monique Robin

Et notre illustration de Une de Elsa Secco en CC (utilisation de l’image de Dave – aka Emptybelly en CC )

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Des alternatives aux pesticides http://owni.fr/2011/03/15/des-alternatives-aux-pesticides/ http://owni.fr/2011/03/15/des-alternatives-aux-pesticides/#comments Tue, 15 Mar 2011 17:03:30 +0000 Gayané Adourian http://owni.fr/?p=51403 Après Le Monde selon Monsanto, Marie-Monique Robin revient en lanceuse d’alerte avec un documentaire efficace, très fouillé et bien ficelé à propos des produits chimiques que nous ingérons malgré nous. Notre poison quotidien est cette fois un réquisitoire contre les industriels de la chimie, mais la journaliste pointe aussi les dysfonctionnements au niveau du circuit d’évaluation des différents produits, avant leur autorisation d’utilisation.

Trois thèmes sont abordés dans le documentaire, partant des agriculteurs victimes de maladies et intoxications chroniques liées à l’utilisation des pesticides en passant par les additifs alimentaires pour finir par les perturbateurs endocriniens (dont le bisphénol A). Tout au long du circuit, Marie-Monique Robin se balade d’institution en institution, appuyant ses recherches avec de nombreuses interviews.

La France championne avec 88 000 tonnes sur 140 000

En Europe, la France est le premier utilisateur de pesticides avec une consommation annuelle de 88 000 tonnes sur 140 000 pulvérisées chaque année. En tout, environ 400 molécules (ou principes actifs) sont autorisées actuellement. Petite comparaison : en 1990, 1 000 substances étaient en circulation, d’après Jean-Charles Bocquet, directeur du syndicat de l’industrie des pesticides, l’UIPP. Et toute la première partie du documentaire traite des problèmes de l’utilisation massive des pesticides.

Mais en regardant Notre poison quotidien, j’ai eu l’impression que l’agriculture n’avait pas évolué depuis 1964, date à laquelle le film Le pain et le vin de l’an 2000 a été diffusé. Comme le dit très bien Marie-Monique Robin toutes les bonnes questions ont été posées dans ce film des années 60, mais la réalisatrice oublie que l’agriculture a évolué depuis, avec par exemple ce qu’on appelle aujourd’hui la chimie verte.

Car parallèlement à toute cette filière, un mouvement autour de pesticides non-toxiques est en marche, illustré par le plan Ecophyto 2018 : ce plan, mis en place suite au Grenelle de l’environnement, prévoit de réduire de moitié les quantités utilisées d’ici… 2018, « dans la mesure du possible » souligne Antoine Blanchard, ingénieur agronome.

Une autre alternative émerge avec les stimulateurs de défenses naturelles (SDN) : basés sur le même principe que celui du vaccin mais appliqué aux plantes, ils font appel à des connaissances bien établies sur l’immunité des plantes. L’idée consiste à pulvériser une substance qui met en branle les réactions de défense des plantes (souvent une substance naturelle, extraite d’une algue ou d’une bactérie), afin d’immuniser celle-ci — sans être directement toxique pour le ravageur et donc pour l’environnement et l’être humain.

Un certain nombre de produits sont déjà commercialisés en France, en Europe et aux États-Unis et les efforts politiques et économiques vont dans ce sens. Mais Antoine Blanchard indique que leur usage ne se diffuse pas, pour plusieurs raisons. Il souligne :

Ils forment un nouveau paradigme, une nouvelle façon de penser la lutte phytosanitaire qui est compliquée à imposer ; ils sont délicats à manier et ont une efficacité plus variable (selon les tests en vigueur).

De plus, ils sont souvent aux mains des grosses firmes de l’industrie phytosanitaire, qui ne sont pas incitées à les mettre en avant. Jean-Charles Bocquet de l’UIPP confirme :

Les SDN sont moins efficaces que les produits chimiques actuellement utilisés, compliqués à mettre au point et posent quelques problèmes au niveau de leur stabilité.

Pourtant, dans ces pesticides de synthèse, chaque paramètre scientifique – efficacité in vivo et in vitro, métabolisme et devenir in vivo, toxicologie, écotoxicologie… – est connu le plus précisément possible, ce qui n’est pas négligeable. Les SDN sont donc un objet encore à l’étude dont les recherches doivent être favorisées.

D’autres alternatives qui sont purement biologiques aux pesticides existent aussi. Celles-ci ont en leur faveur d’être portées par des PME et donc délaissées par les grands groupes, notamment en raison de l’importance des savoir-faire (non brevetables) dans le secteur du biologique. Curieusement (ou pas) Marie-Monique Robin, n’en parle pas du tout dans son film. Elle prône par contre avec force le retour à l’agriculture biologique.

Illustrations FlickR CC : arbeer.de, Leonard John Matthews

Retrouvez notre dossier sur l’enquête de Marie-Monique Robin :

Les dangers de l’aspartame et le silence des autorités publiques, les bonnes feuille du livre de Marie-Monique Robin Notre Poison quotidien

Des alternatives aux pesticides

Et notre illustration de Une de Elsa Secco en CC (utilisation de l’image de Dave – aka Emptybelly en CC )

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http://owni.fr/2011/03/15/des-alternatives-aux-pesticides/feed/ 11
“Notre poison quotidien”: un docu difficile à digérer http://owni.fr/2011/03/15/notre-poison-quotidien-un-docu-difficile-a-digerer/ http://owni.fr/2011/03/15/notre-poison-quotidien-un-docu-difficile-a-digerer/#comments Tue, 15 Mar 2011 13:25:53 +0000 Martin Clavey http://owni.fr/?p=51420 Le 15 mars, Arte diffusait le nouveau documentaire de Marie-Monique Robin, Notre poison quotidien. Après avoir traité, avec un certain succès, le thème des OGM dans le Monde selon Monsanto, la documentariste s’attaque maintenant à l’agroalimentaire en général. Elle a enquêté de manière approfondie et très documentée sur trois sujets en particulier :

  • les pesticides
  • l’aspartame
  • le bisphénol A (que l’on retrouve dans de nombreux plastiques).

Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’après l’avoir vu, on a du mal à digérer.

On a du mal à digérer notamment parce que Marie-Monique Robin nous présente un monde occidental dans lequel l’agriculture intensive a tellement pris le dessus que nos agriculteurs ont du mal à réagir face aux différents accidents du travail dont ils font les frais. Car, comme le montre le documentaire, ce sont essentiellement les agriculteurs qui sont victimes de l’usage intensif des pesticides. Depuis des années, l’utilisation de ces produits est très ancrée dans la pratique des agriculteurs. Et les pressions sont très fortes pour ne pas parler des problèmes qu’ils engendrent (aussi bien des autres agriculteurs que des fournisseurs ou des commanditaires). Les agriculteurs ont donc eu beaucoup de mal à faire reconnaître certaines maladies dues à leur usage. Et il a fallu attendre le milieu des années 90 pour que “des études américaines, italiennes et scandinaves montrent que certains cancers étaient plus fréquents dans la population agricole que dans la population générale” indique dans le documentaire le docteur Jean-Luc Dupupet (médecin de la Mutuelle Sociale Agricole).

Marie-Monique Robin revient aussi longuement sur la mise sur le marché de l’aspartame alors que des scientifiques prévenaient déjà la Food & Drugs Administration (FDA) que le rapport bénéfices/risques n’était pas bon. En effet, le bénéfice de l’utilisation de l’aspartame, s’il apporte un certain confort, présente aussi des risques d’effets secondaires et de cancers. Dans son enquête, Marie-Monique Robin explique aussi comment, Searle, la société pharmaceutique productrice de l’aspartame a réussi a imposer aux politiques la mise sur le marché de son produit.

Rendre publiques les données toxicologiques pour un meilleur fonctionnement

La digestion de ce documentaire est encore plus difficile quand on apprend comment les agences de sécurité sanitaire travaillent. Robin dénonce les méthodes de calculs de la dangerosité des produits. Elle explique que la DJA (la Dose journalière admissible par le corps d’un individu moyen de 60 kg), mesure utilisée par toutes les agences, est calculée de manière assez floue. Basée sur des expériences sur les animaux, elle utilise un facteur de sûreté décidé arbitrairement par la FDA dans les années 60.

Pour mesurer cette DJA, les agences utilisent les données fournies par les industriels. Mais ces données sont protégées par une clause de confidentialité et ne sont accessibles qu’aux experts des agences. Il est donc impossible de vérifier le bon fonctionnement du système.

Angelika TRITSCHER, secrétaire adjointe au Joint FAO/WHO Expert Committee on Food Additives (JECFA) et à la Joint FAO/WHO Meetings on Pesticide Residues (JMPR) justifie cette rétention des données par la protection du droit de propriété intellectuelle. Mais comme le dit Eric Millstone, professeur de politique scientifique interrogé par Marie-Monique Robin :

[Cette pratique] ne sert que les intérêts des entreprises chimiques et est complètement contraire aux intérets des consommateurs et de la santé publique. Seules les données qui concernent le processus de fabrication des produits peuvent justifier ces clauses de confidentialité car elles représentent des informations commerciales sensibles. En revanche, toutes les données toxicologiques devraient être dans le domaine public.

La dose ne fait plus le poison

La documentariste aborde aussi le problème du Bisphénol A (utilisés jusqu’à récemment dans les biberons) et du nonylphénol, hormones de synthèse utilisées dans certains plastiques qui entraînent des dérèglements hormonaux graves pouvant déclencher eux-mêmes des cancers (du sein et de la prostate par exemple). Ces substances jouent le rôle de perturbateurs endocriniens : elles ne sont pas toxiques au sens habituel du terme mais perturbent le bon fonctionnement du système hormonal et donc la fonction sexuelle et reproductrice.

Pour les agences de sécurité sanitaire, la DJA est la mesure la plus importante, car elle permet d’autoriser la mise sur le marché agroalimentaire d’une substance. Et cette DJA s’inscrit dans la logique qui fait que c’est à partir d’un certain seuil qu’une substance est déclarée nocive. Mais l’action des hormones n’est pas proportionnelle à la dose injectée. Par exemple, une faible dose d’une certaine hormone peut avoir une action stimulatrice alors qu’une dose importante de cette même hormone peut être inhibitrice. Mais les industriels et les agences restent sur leur dicton “La dose fait le poison” et ne veulent pas tester de produits à très faibles doses.

Enfin, Marie-Monique Robin pointe le fait que les agences sanitaires ne s’occupe aucunement des problèmes qui pourraient être liés aux “cocktails de substances agroalimentaires” sachant qu’au-delà de trois substances ingérées les toxicologues ne savent pas quels effets cela produit sur l’organisme.

Une naïveté parfois un peu trompeuse

Mais Notre poison quotidien est aussi difficile à digérer parce que son auteure refuse à la science et aux scientifiques la possibilité de se tromper et d’être approximatifs. Quand elle pointe le fait qu’une DJA ait été révisée au vu de nouvelles données, elle demande au scientifique en face d’elle si l’ancienne DJA nous protégeait. Mais on sait très bien que n’importe quel seuil de sécurité est posé en fonction des connaissances du moment et qu’il faut réviser ce seuil si on a de nouvelles données. Et ceci n’est pas seulement vrai en science, mais dans tous les domaines.

Enfin, Marie-Monique Robin conclue candidement son documentaire par une séquence en Inde pour nous montrer que dans la population de l’Orissa (état de l’est de l’Inde) les cancers sont “quasiment inexistant” (à l’exception de celui de la bouche dû à la mastication de tabac).

Consommant leurs propres légumes et du Curcumin, les villageois qu’elle rencontre ne connaissent ni cancer, ni obésité. D’ailleurs regardez, la personne interrogée ne sait même pas vraiment ce qu’est le cancer. Ici, Robin va vite en besogne et compare des modes de vie difficilement comparables. Faut-il en conclure que nous devons adopter le mode de vie indien ? Ou que cette fin est un appel a ce que nous ne aidions les pays du Sud à ne pas reproduire nos erreurs ?

Espérons que c’est cette deuxième idée que la documentariste veut faire passer. Il serait naïf de sa part de penser que la solution à tous nos problèmes agroalimentaires consisterait en l’adoption du modèle traditionnel indien.

Cette enquête nous montre que la surveillance des produits de l’industrie agroalimentaire est autant soumise aux pressions et aux conflits d’intérêts que celle du médicament (mis en lumière par le Mediator). Mais dans le cas du médicament, il existe au moins une chaîne de vérification qui n’existe pas dans l’agroalimentaire.

>> Illustrations CC Elsa Secco pour OWNI et FlickR (utilisation de l’image de Dave – aka Emptybelly en CC ) Ðeni [away for a while]

Retrouvez notre dossier sur l’enquête de Marie-Monique Robin :

Les dangers de l’aspartame et le silence des autorités publiques, les bonnes feuille du livre de Marie-Monique Robin Notre Poison quotidien

Des alternatives aux pesticides

Et notre illustration de Une de Elsa Secco en CC (utilisation de l’image de Dave – aka Emptybelly en CC )

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http://owni.fr/2011/03/15/notre-poison-quotidien-un-docu-difficile-a-digerer/feed/ 39
Nourriture contaminée, le nouveau business de la Camorra http://owni.fr/2011/01/24/nourriture-contaminee-le-nouveau-business-de-la-camorra/ http://owni.fr/2011/01/24/nourriture-contaminee-le-nouveau-business-de-la-camorra/#comments Mon, 24 Jan 2011 09:00:10 +0000 Bénédicte Lutaud http://owni.fr/?p=43365 La mafia napolitaine s’était déjà rendue célèbre avec l’affaire de la mozzarella di buffala contaminée en 2008. Selon un mémo diplomatique publié par WikiLeaks, elle a trouvé un nouveau business : l’importation à bas coût d’aliments toxiques.

La Camorra importe de la nourriture pleine de pesticides et de bactéries. Elle fait aussi des affaires avec du pain toxique.

C’est J. Patrick Truhn, consul général américain à Naples, qui transmet ces informations dans un télégramme diplomatique classé confidentiel daté du 6 juin 2008, et rendu public par Wikileaks.

Selon l’ancien consul américain de Naples, en Campanie, la Camorra s’enrichit par des “importations à bas coût”, de produits infestés de pesticides ou de bactéries. Truhn parle notamment de pommes remplies de pesticides en provenance de la Moldavie, et de sel importé du Maroc contaminé par l’escherichia coli, une bactérie intestinale. Pour tromper les consommateurs, la Camorra colle sur chaque produit une étiquette “made in Campanie”.

“Parfaite radiographie”

Mais ce n’est pas tout. Le diplomate cite aussi le commandant local des carabiniers, et révèle que “deux tiers” des boulangeries de la région seraient contrôlées par la mafia napolitaine. Dans ces boulangeries, le pain serait fabriqué “avec des matériaux toxiques”. À Caserte (Campanie), écrit encore le diplomate “les usines illégales qui font de la mozzarella utilisent du lait en poudre bolivien”.

Des informations, selon le quotidien Il Messaggero, confirmées par don Luigi Merola, le curé de Forcella (quartier dominé par la Camorra à Naples) connu pour ses prises de position contre la mafia napolitaine. Selon lui, “le rapport du consul est la parfaite radiographie de ce qui se passe dans le Sud”. Le procureur de Naples, Giovandomenico Lepore, a au contraire opposé un démenti formel :

Aucune enquête en cours ne démontre que les clans camorristes aient importé des pommes infestées de pesticides depuis la Moldavie, et du sel contaminé en provenance du Maroc.

Le précédent du lait

Ce n’est pas la première fois que la Camorra s’enrichit tout en risquant d’empoisonner des milliers de personnes. En 2008, un scandale éclate autour du produit phare de la région de Naples : la mozzarella di buffala. Les terres des élevages de buffles qui produisent le lait utilisé pour fabriquer le précieux fromage ont été contaminées. La Camorra y a enterré et incinéré des montagnes de déchets toxiques venus du Nord de l’Italie. Une réaction en chaîne s’en suit : les sols contiennent des taux trop élevés de dioxines, contaminent les buffles et le lait qu’ils produisent. Ce même lait est utilisé pour fabriquer la mozzarella di buffala, contaminée à son tour, et risque d’empoisonner des milliers de consommateurs.

Une opération “lait propre” est alors supervisée par une unité antimafia napolitaine. 14,4% des 173 fromageries des provinces de Naples, Caserte et Avellino se révèlent non conformes au seuil de dioxine autorisé par l’Union européenne. 600 élevages sont mis en quarantaines, et 109 personnes sont mises en examen pour “empoisonnement de substances alimentaires et commerce de produits périmés”.  Certains élevages et fromageries, en réalité, étaient entièrement aux mains des camorristes : les chefs de la mafia locale payaient des subventions aux paysans pour qu’ils acceptent de recevoir des déchets dans leurs champs.

Le 27 mars 2008, la  Commission Européenne exprime ses doutes quant aux mesures prises par les autorités italiennes pour gérer la crise, et conseille aux pays européens de suspendre les importations de mozzarella di buffala. Le ministre de l’agriculture français de l’époque, Michel Barnier, demande aux professionnels de consigner les produits dans l’attente d’en savoir plus. L’ancien ministre italien de l’Agriculture, Paolo De Castro, choisit de répondre en apparaissant à la télévision en train de déguster le fromage napolitain. Mais en vain. Plus personne n’achète la mozzarella qui faisait le succès de la Campanie. Suite au scandale médiatique, des dizaines de producteurs ont vu leurs ventes chuter considérablement. En tout, 30 millions d’euros de perte en deux mois. Déjà en 2003 à Caserte, 6000 vaches avaient dû être abattues à cause du taux de dioxine présent dans leur lait destiné à produire de la mozzarella.

Des millions d’euros en jeu

Les importations à bas coûts d’aliments étrangers revendus “made in Italy”, c’est une stratégie que la Camorra avait aussi expérimentée dans le passé. En 2006, la chaîne télévisée italienne Rai Tre diffuse un documentaire intitulé Le pays du porc (Il paese del maiale), sur la contrefaçon alimentaire. À Castelnuovo Rangone, dans la province de Modène (Nord), un juge découvre que dans plusieurs usines de charcuterie, les jambons de provenance étrangère sont revendus comme des produits typiques italiens, parfois même avec la mention “jambon de Parme”, et donc beaucoup plus chers. Or, ces entreprises de charcuteries sont contrôlées, de manière indirecte, par un clan de la Camorra, les Casalesi.

Sur le marché des produits contaminés, on peut même remonter à 1999, lorsque une enquête sur la mort suspecte de deux hommes près d’une laiterie à Naples permet de découvrir une autre fraude de la Camorra : 16.000 tonnes de marchandises toxiques ont été revendues à des entreprises belges, allemandes et françaises, pour une valeur de 100 millions d’euros. À savoir : du faux jambon de Parme, de la mozzarella contaminée à la dioxine, mais aussi du beurre frelaté ne contenant que peu de lait mais du suif de boeuf et des hydrocarbures. Du beurre acheté par des grandes entreprises françaises de l’agro-alimentaire : Lactalis (avec la fameuse marque Président), Entremont, Sodiaal (Yoplait et Candia), les fromageries Bel (La Vache qui rit)… Ces sociétés prétendent être les victimes dans cette affaire. En revanche, le tribunal de Créteil met en examen les dirigeants de Sodepral et Fléchard, deux entreprises française d’importation, pour “escroquerie en bande organisée” et “fraude sur les qualités substantielles”.

La Camorra a-t-elle encore l’intension de diversifier son business des aliments contaminés? Peut-être qu’un autre télégramme nous le dira. WikiLeaks aurait en sa possession 19 câbles du Consulat américain de Naples, selon les estimations du quotidien allemand Der Spiegel. Pour l’instant, seul cinq d’entre eux ont été publié.

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Crédits photo: Flickr CC Maria Keays avpiedra, avpiedra, wallyg

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Les paysans victimes d’une agriculture de guerre http://owni.fr/2010/11/04/les-paysans-victimes-dune-agriculture-de-guerre-kokopelli-pesticides-agroalimentaire-nourritur/ http://owni.fr/2010/11/04/les-paysans-victimes-dune-agriculture-de-guerre-kokopelli-pesticides-agroalimentaire-nourritur/#comments Thu, 04 Nov 2010 15:23:35 +0000 Christian Fauré http://owni.fr/?p=37096 Dominique Guillet, fondateur de Kokopelli, association qui produit et distribue des semances potagères bio de variétés anciennes, fait l’ouverture du documentaire « Solutions locales pour un désordre global » de Coline Serreau. Il va poser ce qui constitue les prémices de la thèse qui est défendue par la réalisatrice :

Qu’est-ce que c’est la première guerre mondiale en fait ? C’est l’éradication de la paysannerie franco-germanique qui se fait massacrer au front, des millions de paysans sont morts !

Puis il poursuit :

Et donc, cette entreprise de dé-paysannerie a été parachevée par le deuxième guerre mondiale. Et viens se greffer, par dessus tout cela, la synthèse de l’ammoniaque qui permet de faire des bombes et qui après permet de faire des fertilisants de synthèse. Ensuite, l’invention du gaz moutarde qui va donner quoi ? Eh bien tous les insecticides, qui sont des gaz de combats. Puis, avec le plan Marshall de 1947, les États Unis arrivent avec leur tracteurs qui sont la suite logique des tanks. Donc, en fait, l’agriculture occidentale est une agriculture de guerre.

Ce propos est ensuite souligné par celui d’Ana Primavesi, ingénieur agronome, docteur, professeur en gestion des sols de l’université de Santa Maria:

Cette agriculture occidentale est un pacte, une alliance entre deux parties. Le deal était entre l’agriculture et l’industrie qui, après la seconde guerre mondiale, avait d’énormes stocks de poison sur les bras, qui devaient soit-disant « tuer des ennemis » mais, une fois la guerre finie, il n’y avait plus d’ennemis à tuer.

Elle poursuit :

Alors [...] on a eu une idée fantastique. On a dit : l’agriculture n’achète presque rien à l’industrie, de temps en temps un petit tracteur, mais rien quoi… Alors on va faire comme ça, on va passer un accord : l’agriculture achètera des machines puissantes, des engrais chimiques, des pesticides, le tout provenant de l’industrie. L’industrie empochera les bénéfices, l’agriculture sera déficitaire, mais le gouvernement va détourner une partie des impôts pour subventionner et renflouer l’agriculture.

La « révolution verte » est l’expression douteuse qui désigne le bond technologique de l’agriculture pendant la période 1945-1970, grâce aux progrès scientifiques de la première partie du 20° siècle. Elle a été largement diffusé dans le monde jusqu’à modifier radicalement le visage de la paysannerie mondiale et, par voie de conséquence, l’ensemble des ressources naturelles.

Fumigation aérienne en Argentine.

En se lançant à la conquête de l’agriculture, en faisant de l’agriculture un marché industriel, cette industrie dont les racines plongent dans une économie de guerre va défigurer pays et paysans. Cette défiguration repose sur un processus de dissociation systématique de l’économie du vivant.

[Dans son fond cette politique industrielle est profondément pétrie de la métaphysique occidentale et de l'hégémonie de son schème hylémorphique, il faut être ainsi aveuglé par cette pensée pour en arriver à croire que la terre n'est qu'un substrat, de la matière morte et inerte.]

Maintenir le vivant malade pour qu’il reste rentable

Il s’agit d’une dissociation en ce sens que la démarche consiste à briser les liens économiques et écologiques. Les processus naturels sont niés et détruits dans l’objectif d’y substituer l’utilisation des produits de l’industrie. Les milieux qui étaient naturellement associés sont décomposés pour être ensuite recomposés artificiellement dans un milieu industriel dissocié.

Ce milieu industriel dissocié qui s’est mis en place n’a cessé de se généraliser en tendant à privatiser les ressources naturelles en y substituant des ressources artificielles, notamment avec le scandale des semences.

Cette agriculture intensive et industrielle a une production qui n’est pas saine, qui est toujours toxique, même si c’est à des degrés divers et même parfois infinitésimaux. Pourquoi produire des plantes (mais la question vaut aussi pour les animaux) malades ? Cela se comprend aisément : plus les plantes sont en mauvaise santé durant le cycle de leur exploitation, plus il faudra utiliser les services et les produits de l’industrie chimique et agro-alimentaire pour les maintenir en vie, sous perfusion.

L’ensemble de ces actions visant à maintenir le vivant malade induit en même temps une augmentation du nombre de transactions qui fait mécaniquement augmenter le PIB d’un pays. De là à interpréter le PIB comme une mesure indiquant le degré d’intoxication d’une nation, il n’y a qu’un pas. Un pas que l’on peut franchir lorsqu’un intervenant du documentaire de Coline Serreau explique que :

[...] une rivière en bonne santé n’est pas valorisée en économie, elle ne représente aucune richesse. Mais commencez par la polluer puis essayer de réparer l’irréparable et vous observerez que tout cela a augmenté sensiblement le PIB. (citations de mémoire)

Face à de tels exemples, on comprend l’importance et l’enjeu de la réforme du PIB. Indicateur qui est devenu un instrument de mesure qui ne valorise essentiellement que l’ensemble des transactions d’une industrie qui fonctionne de manière quasi exclusive sur le mode de la dissociation. (Extrapolons : occupez-vous de vos parents et vous ne produisez aucune richesse, mais mettez-les en maison de repos et vous augmentez le PIB, pareil pour vos enfants quand vous les faites garder voire quand vous les mettez devant la télévision.)

En ce qui concerne l’agriculture, le résultat est là : on a beau voir de beaux champs à perte de vue, symboles photogéniques de la modernité agricole mais, ce qu’il faut voir, c’est en réalité un désert stérile, un paysage mortifié et à l’agonie.

Le paysan devenu exploitant agricole, impuissant face au système qui les endette

La terre est morte, elle ne respire plus car toute sa diversité micro-biologique a été éradiquée à coup de labours et d’intrants toxiques. Même les blés que l’on voit de nos propres yeux ne sont que des morts vivants. Car tout a été fait et organisé pour que rien ne pousse et rien de croisse sans le recours à l’industrie de l’intensité : de la graine génétiquement modifiée et brevetée jusqu’à la récolte en passant par les pesticides, herbicides et engrais. Toute l’agriculture se fait en réalité « hors-sol » car la terre a été tuée. Il s’agit d’un terracide dont toute l’écologie environnementale et alimentaire paye quotidiennement son tribut économique et environnemental.

Sans surprise, mais avec encore plus de tristesse, on constate que ce que le capitalisme productiviste et consumériste fait à notre psychique (cf. la baisse tendancielle de l’énergie libidinale, la débandade généralisé et le malaise dans lequel nous sommes), il le fait aussi en même temps, dans une même tendance, à nos terres. À la prolétarisation du travailleur (perte de savoir-faire) , puis à celle du consommateur (perte de savoir-vivre) fait écho celle de l’agriculteur et du paysan, devenus exploitants agricole, c’est à dire qu’on en a fait les agents de leur propre déchéance.

En France, les premières et les plus grandes victimes de cette prolétarisation sont d’abord et majoritairement les exploitants agricoles regroupés sous le syndicat FNSEA. On y trouve de plus en plus des hommes qui sont devenus dangereux car endettés jusqu’au cou et empêtrés dans un système aberrant, soutenu par la politique agricole commune dont il sont à la fois les agents et les premières victimes. Quel système pernicieux !

Si le diagnostic est une chose importante et première, il doit toutefois conduire à des thérapeutiques et des thérapies, et notamment conduire à des processus de reconversion qui offrent de nouvelles perspectives. Le documentaire de Coline Serreau, qui m’a ici servi de prétexte, en donne. La réalisatrice en fait un résumé dans un cours entretien vidéo :

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Il faut donc reconstruire nos pays et notre paysannerie et trouver des passerelles pour offrir des solutions non seulement à ceux qui sont devenus bien malgré eux des paysans prolétarisés mais également à ceux qui souhaitent se reconvertir dans la paysannerie. Si la question de la paysannerie est plus que jamais une question d’avenir, c’est aussi parce qu’il ne s’agit pas de revenir mille ans en arrière en niant les progrès accomplis : il y a nécessairement un avenir industriel et technologique à la question agricole, mais elle ne peut pas passer par des pratiques qui nous inscrivent dans la « mécroissance » sous prétexte de maintenir des rentes de situations industrielles héritées d’une industrie qui est en guerre contre l’humanité et la terre entière depuis près d’un siècle.

Je signale que le documentaire de Coline Serreau est en vente dès le 2 Novembre 2010, et que ce n’est pas qu’un produit de consommation, comme vous l’aurez sans doute compris (même si j’ai par ailleurs quelques réserves qui ne sont pas opportunes de développer ici et maintenant)

Billet originellement publié sur le blog de Christian Fauré sous le titre Prolétarisation paysanne et terracide.

Photo FlickR CC Ol.v!er [H2vPk] ; Santiago Nicolau ; C.G.P. Grey ; Diego Lorenzo F. Jose.

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http://owni.fr/2010/11/04/les-paysans-victimes-dune-agriculture-de-guerre-kokopelli-pesticides-agroalimentaire-nourritur/feed/ 2
Vida de mierda, comida de mierda, cuerpos de pobres (s) http://owni.fr/2010/04/11/vida-de-mierda-comida-de-mierda-cuerpos-de-pobres-s/ http://owni.fr/2010/04/11/vida-de-mierda-comida-de-mierda-cuerpos-de-pobres-s/#comments Sun, 11 Apr 2010 14:29:25 +0000 Laurent Chambon, traduction Ney Fernandes http://owni.fr/?p=11993
Impressionné par la qualité de l’article de Laurent Chambon “Vie de merde, bouffe de merde, corps de pauvres”, publié d’abord sur Minorités et qu’il a découvert sur Owni, Ney Fernandes l’a traduit en espagnol. Pour le remercier, c’est simple : partagez cette analyse avec vos amis hispanophones !

Laurent Chambon, doctor en ciencias políticas y cofundador de la revista Minorités, reflexiona sobre los orígenes de la pandemia de obesidad observada en Estados Unidos y su aparición en Francia. Este fenómeno es ante todo el síntoma de una sociedad profundamente desigual.

Cada vez que voy al suburbio donde crecí, el 91 [suburbio parisino, Essonne], varias cosas me impresionan: (1) todo está muy limpio y hay flores por todos lados, a pesar de los automóviles incendiados, (2) las zonas comerciales al estilo estadounidense (tiendas/galpones construidos de prisa alrededor de un estacionamiento) reemplazan los últimos bosques, (3) se ve que la gente tiene cada vez menos dinero y los supermercados han eliminado los productos más caros para ofrecer apenas lo más barato, (4) la fealdad comercial y la precariedad de los letreros publicitarios omnipresentes son extremas y (5) hay mucha gente muy gorda por todos lados. Más que gorda. Obesa, en realidad.

Hace cuatro años viajé a Detroit para mezclar mi primer disco. Allí, la fealdad estructural de la ciudad y la obesidad de la gente formaban parte del exotismo. Pero en mi casa, en el 91, la violencia de esa pobreza cultural y visual mezclada con la epidemia de obesidad me dejó pasmado. Mientras digería mi decepción encontré varios libros y artículos sobre alimentación, obesidad, clases sociales y revolución verde. Como siempre, hay que saber separar el trigo de la cizaña, por más difícil que sea.

Una de las teorías en boga en el norte de Europa es que la obesidad es una enfermedad mental. Una especie de anorexia al revés, mezclada con hábitos propios de una adicción, cierta debilidad moral y disfunciones de comportamiento. En vez de dejar que los laboratorios nos engatusen con píldoras mágicas que hacen adelgazar sin ningún efecto secundario, los médicos y sicólogos se dedican a profesar principios de autocontrol y elaborar terapias para impedir que la gente se atiborre como puercos.

Cosa de perezosos

No puedo negar que me produce desazón ver esos turistas estadounidenses obesos en Amsterdam que se hartan de menúes XL de papas fritas, hamburguesas y tortillas mexicanas (que contienen al menos media hoja de lechuga, cómo no), pero que tienen una crisis de asma si les sirven una Coca-Cola normal en vez de la versión dietética que pidieron.

Ver a un obeso comer en exceso es casi tan insufrible como esas campañas de las organizaciones de protección animal con cachorritos infelices encerrados en pequeñas jaulas. Hay algo obsceno en ese atiborramiento de obesos.

Así y todo, aunque nos den ganas de gritar que los estadounidenses son obesos por perezosos y golosos, me pregunto si no habrá una explicación realmente válida. Porque quien ha vivido en Estados Unidos sabe perfectamente que los más pobres son súper delgados o súper gordos. Los cuerpos de los estadounidenses delatan su pertenencia a una clase social, incluso antes que su acento y su ropa. Los ricos tienen cuerpos atléticos y dientes perfectos, los pobres no tienen ni lo uno ni lo otro, y la clase media lucha por limitar los estragos para no parecerse demasiado a los pobres.

Cuando se sabe a qué punto la meritocracia estadounidense es un mito y que tanto la riqueza como la pobreza se heredan, se llega a la conclusión de que debe haber algo más que la voluntad personal que permite a los ricos ser bonitos y obliga a los pobres a ser feos. Por lo tanto, el supuesto de que los gordos son gordos porque son perezosos, por más evidente que ello parezca, no me convence para nada.

Por más que los sicólogos intenten vendernos sus terapias antigula, yo no les creo.

Cosas de clase

Uno de los libros fundamentales de la década, que ya comenté en la edición n.º 10 de Minorités, es The Spirit Level, Why More Equal Societies Almost Always Do Better, de Richard Wilkinson y Kate Picket. El libro da a conocer una relación estadística entre las enfermedades y las desigualdades.

En resumen, mientras más desigual es una sociedad, más sus habitantes son gordos, depresivos y violentos. En las sociedades más igualitarias la gente controla mejor su vida: hay menos criminalidad, menos violencia, menos adolescentes embarazadas, menos violaciones, menos obesidad, menos enfermedades, menos extrema derecha…

Los dos sociólogos ingleses reconocen sin embargo que no pueden explicar en detalle todo el fenómeno: todo indica que las desigualdades son un factor de estrés individual y colectivo que tiene consecuencias dramáticas, pero no encuentran material científico que explique por qué el hecho de vivir en una sociedad desigual produce obesidad.

Pues yo di con un artículo de investigadores –posteriormente citado en Slate– que lograron demostrar algo realmente interesante: la obesidad no tiene una relación directa demostrable con la cantidad de alimentos ingeridos, ni tampoco es la causa de todas las enfermedades que suelen asociarse a los problemas de sobrepeso. En realidad, la obesidad es un síntoma de envenenamiento alimentario.

En pocas palabras, el cuerpo humano se protege de una alimentación de mierda almacenando los elementos que no sabe desintegrar o transformar en la parte externa del cuerpo, en su capa de grasa externa. Mientras más mierda comamos, más grasa repartimos sobre nuestro vientre, nuestros senos y nuestro trasero. Al cabo de unos diez años, cuando el cuerpo ya no logra defenderse y deja de almacenar toda esa basura en su grasa externa, los órganos internos se ven afectados y surgen las enfermedades derivadas de la obesidad.

Nación comida chatarra

En Fast Food Nation, un libro muy bien escrito que devoré de una tirada, Eric Schlosser explica cómo la industrialización de la alimentación en Estados Unidos fue acompañada por el surgimiento de una economía basada en sueldos bajos y de un proletariado ultramóvil y esclavizado a voluntad, y por la construcción de un país desigual donde las infraestructuras financiadas por todos están al servicio de los intereses de unos pocos grupos industriales.

El autor describe la explotación de adolescentes por parte de cadenas de alimentación rápida, la precariedad de los controles de higiene, la pésima calidad de los ingredientes utilizados por la industria alimentaria, la crueldad infligida a los animales y los trabajadores ilegales (cuyos restos pueden terminar mezclados en tu hamburguesa), sin olvidar la difusión de la mentira generalizada.

La primera mentira es la de la composición de los productos vendidos: grasa de pésima calidad, grasas trans (que ya han sido prohibidas en algunos estados y ciudades), uso de interiores y aditivos de todo tipo…

Lo más escandaloso es la mentira del olor y del sabor: para escondernos que comemos literalmente mierda, a la carne se le inyecta un sabor a “carne sellada a la parrilla”, mientras que las papas fritas precocidas vienen con un perfume de papas-ricas-que-ya-no-existen, la mayonesa trae una fragancia de queso y a los caldos de restos de pollo pasados por la centrifugadora para aumentar la cantidad de agua también se les agrega sabor a pollo.

En cuanto al umami, ese quinto sabor descubierto por los japoneses, el que tanto nos hace amar el sabor del pollo frito o de la carne asada, nada tiene que ver con los ingredientes o la cocción: proviene de aditivos químicos destinados a engañar el paladar.

No sólo nos venden mierda en embalajes bonitos, sino que además engañan nuestros instintos y nuestro olfato.

En Internet y en los diarios ha circulado un artículo famoso de una estadounidense que dejó al aire libre un Happy Meal™ –ese menú preparado por McDonald’s con tanto amor para los niños– para ver qué sucedía. Al cabo de un año seguía intacto, totalmente menospreciado por los hongos, las bacterias y los insectos. Si ni siquiera las bacterias y los hongos dan cuenta de ese tipo de comida, ¿cómo pretender que nuestro cuerpo pueda desintegrarla y encontrar en ella los elementos que necesita? Muchos padres que conozco y que leyeron ese artículo quedaron más que preocupados.Envenenamiento colectivo planificado

Basta con pasearse por cualquier supermercado estadounidense, neerlandés o británico para darse cuenta del predominio de la comida industrial: es casi imposible prepararse una comida con productos que no hayan sido procesados y carezcan de aditivos creados para engañar nuestros sentidos. Comer sano requiere disponer de recursos financieros y organizacionales que no están al alcance de los pobres.

Esa misma evolución se observa en el suburbio donde crecí: las tiendas de productos frescos cerraron sus puertas hace mucho tiempo y han sido reemplazadas por tiendas de telecomunicaciones, mientras los supermercados reservan cada vez más espacio para los platos preparados por la industria alimentaria (con márgenes de ganancia muy alentadores) en detrimento de los productos frescos no procesados (que ofrecen márgenes muy inferiores).

Vender un puerro a unos cuantos céntimos para preparar una sopa es mucho menos rentable que vender un litro de sopa por varios euros, sobre todo cuando no contiene más que almidón, potenciadores de sabor, grasas de mala calidad y sal.

De pronto, las estadísticas de los sociólogos cobran sentido: en las sociedades desiguales (encabezadas por Estados Unidos y Reino Unido) es donde se ve la pobreza más extrema, pero también donde la industria alimentaria ha desarrollado la mayor cantidad de alimentos a bajo precio para satisfacer las necesidades calóricas de los más pobres, porque su ingreso disponible es mucho más bajo que en los países más igualitarios.

Los países europeos que siguen esa tendencia fácil de la desigualdad también son los más afectados por la industrialización de la alimentación, una respuesta barata a la baja de sueldos reales y a la violencia organizacional infligida a las familias.

En una sociedad donde las personas ya no tienen muchas oportunidades para juntarse a comer porque se les exige ser más flexibles a la vez que se les paga menos, la comida chatarra industrializada pasa a ser una respuesta normal.

Campaña “comer y moverse”

Ante ese panorama, ver esas campañas públicas que llaman a “comer y moverse” (www.mangerbouger.fr) seguidas de avisos publicitarios de comida chatarra en la tele es algo que me saca de quicio. Dejan a las clases medias pauperizarse, transforman las ciudades en centros comerciales vulgares y accesibles únicamente en automóvil, donde la única comida disponible es mierda perfumada, y luego nos dicen que tenemos que movernos si no queremos terminar todos obesos.

Ahora que sabemos que nuestro cuerpo se pone obeso porque nos hacen ingerir productos tóxicos, y que comemos mierda porque así alcanzamos una organización óptima para maximizar las ganancias de algunos mientras mantenemos los sueldos de otros tan bajos como sea posible sin que la gente tenga hambre, ¿no les parece un tanto irónico escuchar que si movieran un poquito más su trasero serían menos gordos?

Lo que me enfurece más aún es que ya sabemos que el modelo de desarrollo estadounidense es catastrófico: una naturaleza agotada, ciudades feas donde se vive mal, clases medias pauperizadas y obligadas a vivir de los créditos porque el sueldo no da abasto para alimentar a la familia, y un cuasi monopolio de la alimentación industrial que ha provocado una obesidad pandémica y una morbilidad sin precedentes, incluso entre los niños.

Se sabe, pues, y no se hace nada. Seguimos igual.

Todo está muy bien y el país se moderniza. ¿Quieren un poco más de nuestra mierda perfumada? Eso sí, no sean perezosos y muevan un poco el culo…

> Article initialement publié sur Minorités.org, traduit par Ney Fernandes

> Illustrations par Lee Coursey, The Rocketeer, Mustu et Srdjan Stokic et colros (une) sur Flickr

> Légendes par la rédaction

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